Testez vos aptitudes interculturelles en Amérique latine

par Michel Leclerc
intercsl@globetrotter.net

 

Bonjour à toutes et tous,

Lors de ma dernière chronique, j'invitais mes fidèles lecteurs de partout sur la planète à dialoguer avec les lecteurs québécois. Lors de la dernière édition de COMMERCE MONDE, j'écrivais: "C'est un peu ce que je souhaite faire en retenant les conseils de nos lecteurs reçus immigrants ou de ceux qui habitent hors du Québec. C'est par des situations concrètes qu'ils enrichiront notre réflexion. De plus, je tirerai aussi de différents exercices (plusieurs auteurs américains sont particulièrement intéressants à ce sujet) des situations vraisemblables ou qui ont déjà été vécues."

Je crois que pour le moment, je devrai m'en tenir qu'à la troisième phrase. Voici donc un cas intéressant pour ceux qui désirent commercer avec l'Amérique latine.

La scène se passe dans une boutique quelque part en Amérique latine. Suivez bien le dialogue et interrogez vous sur la leçon qui découle de la partie du dialogue qui est encadrée.

Madame Girard vient d'entrer à l'épicerie de Roberto:

- ROBERTO: Bonjour Madame Girard. Comment allez-vous? Quel plaisir de vous revoir!

- Madame GIRARD: Bonjour, Roberto. Comment allez-vous?

- ROBERTO: Très bien. Merci. Que puis-je faire pour vous?

- Madame GIRARD: D'abord, j'aimerais une demi-douzaine d'œufs.

- ROBERTO: La voici. Autre chose?

- Madame GIRARD: Ensuite, 500 grammes de beurre.

Octavio entre dans l'épicerie:

- ROBERTO: Oui. Salut Octavio. Comment vas-tu?

- OCTAVIO : Très bien. Et toi?

- ROBERTO: Que puis-je pour toi?

- OCTAVIO : As-tu des bananes?

Et Rosita entre dans l'épicerie à son tour:

- ROBERTO: Bien sûr. Ah! Rosita. Et la santé? Ça fait des lunes que je t'ai vue! Comment va   ton petit?

- ROSITA : Il se porte très bien.

- ROBERTO: Que puis-je pour toi?

- Madame GIRARD: Roberto, je pensais que vous me serviez !

- ROBERTO: Mais je suis en train de vous servir, Madame Girard!

Votre interprétation :

 


Notre interprétation:

Madame GIRARD appartient à une culture monochronique dont, semble-t-il, l'exemple le plus achevé soit en Amérique du Nord. Roberto appartient à une culture polychronique.

Lorsqu'une personne appartenant à une culture monochronique se trouve dans une situation de client dans une boutique, elle s'attend à recevoir l'attention exclusive du vendeur; de l'avis de cette personne, la relation avec le vendeur doit être complétée avant qu'une autre relation s'engage avec un autre client. C'est un comportement que l'enfant apprend très jeune: "Maman te parlera quand elle en aura fini avec Papa".

Les cultures polychroniques ont une toute autre dynamique; les transactions sont faiblement linéaires, plutôt circulaires. Ainsi, il serait impoli de la part de Roberto d'ignorer Octavie quand celui-ci entre dans l'épicerie simplement parce qu'il est en train de servir Madame Girard (Madame Girard est inconfortable). Cependant, si Roberto avait ignoré Rosita, c'est Octavio, comme appartenant à une culture polychronique, qui aurait été inconfortable.

Imaginons d'autres situations dans une culture polychronique. Par exemple, si vous êtes invité à manger chez une personne de culture polychronique, il faudra vous attendre à ce que votre hôte vous quitte quelques minutes pour régler une affaire. Dans notre culture on dira qu'il est impoli à notre égard; dans une culture polychronique, on dira qu'il aurait été impoli s'il n'avait pas répondu à la sollicitation du visiteur inattendu.

J'attends donc des histoires vécues ou imaginées de la part de nos lecteurs qui viendront enrichir notre discussion.

À la prochaine fois.

(Inspiré de: STORTI, Craig : Cross cultural dialogues.)