Santé-municipalité-mondialisation
Québec a reçu les Amériques

par Daniel Allard

 

Quelque 620 participants sont venus à Québec, en mars dernier, dont 150 du Brésil seulement et environ 200 du Québec, dans le cadre du 3e Congrès des responsables locaux de santé des Amériques.

Provenant de 18 pays des Amériques et d'Europe, les délégués étaient invités à approfondir un thème au goût du jour: "Santé et qualité de vie: nos municipalités à l'heure de la mondialisation".

Pourquoi ce thème? "Nous voulions regarder l'impact de la mondialisation sur la santé et le rôle de l'État sur les programmes sociaux et comment au niveau local on peut développer des initiatives pour améliorer les services à la populations" explique Réal Lacombe, en très bonne connaissance de cause, puisqu'il était co-président du comité scientifique du congrès. Avec son collègue Michel O'Neil, il a développé le programme de l'événement et recruté les présentateurs.

Résultat: les assises du troisième congrès de ce réseau international auront permis d'adopter, à l'unanimité, la "Plate-forme de Québec 2000". Afin de transposer les principes de celle-ci en réalisations tangibles, les délégués ont prévu développer, d'ici la fin de l'année 2000, un plan d'action qui mise sur le capital social et la solidarité, afin de contrer les effets de la compétitivité et de la mondialisation, considérées comme peu enclines à supporter le progrès social.

La "Plate-forme de Québec"

Le texte complet de la Plate-forme, ainsi que ceux de plusieurs autres textes de la conférence, sont disponibles sur le site suivant:

www.msss.gouv.qc.ca/congres_quebec/fr/index.htm

Réal Lacombe, dans son travail quotidien, est un Québécois très bien connu en tant que coordonnateur du Réseau québécois de villes et villages en santé (RQVVS). Si Québec a reçu ce congrès international, c'est beaucoup grâce à lui. Il est parmi les fondateurs de l'implantation du concept des "Healthy Cities" au Québec, dès les années 80.

Un premier congrès s'était tenu en 1995, au Brésil, à Fortaleza. Il avait permis au RQVVS d'établir ses premiers contacts en Amérique latine. Dès la deuxième édition du congrès, à Cuba, à La Havane, en 1997, il fut d'ailleurs décidé de tenir la troisième rencontre à Québec en 1999. C'est finalement en mars 2000 que le rendez-vous de Québec se sera tenu.

"Les gens d'Amérique latine voulaient venir à Québec d'abord pour mieux connaître notre système de santé et également pour connaître le réseau VVS", explique Réal Lacombe, de son bureau de Beauport, en banlieue de Québec. "Présentement, les pays les plus demandeurs sont le Brésil, la Colombie, le Pérou. C'est plus difficile d'implanter notre concept dans les pays à structure centralisée, comme le Mexique, par exemple", précise-t-il.

Le 4e congrès se tiendra à Rosario,
en Argentine,
en 2002

Le réseau des responsables locaux de santé des Amériques est encore une initiative de concertation internationale jeune et sans grandes ressources. Actuellement, il n'existe d'ailleurs pas de structure formelle entre les congrès. "Et il y a aussi un autre réseau de colloque, tous les deux ans, pour les "Healthy Cities"... et une démarche de fusionner les deux est d'ailleurs en cours", ne cache pas l'expérimenté médecin.

Pour le RQVSS, le congrès de Québec représentait surtout un enrichissant exercice de continuité: "Ce n'est pas un nouveau départ, c'est une continuité dans notre volonté de favoriser les échanges de municipalité à municipalité, de rendre disponible l'information provenant de nos 136 municipalités membres et d'apporter une assistance technique pour exporter l'idée de VVS", détaille encore Réal Lacombe.

Le Québec lui parait-il à l'avant-garde en la matière? "Nous ne sommes pas si à l'avant-garde que ça! A Porto Alegre, au Brésil, le budget municipal est adopté par environ 20 000 personnes et ce processus hautement démocratique fonctionne depuis plus de 12 ans", s'empresse-t-il de témoigner.

L'équipe du RQVVS  - actuellement cinq personnes - est loin d'être à ses premières armes en matière de coopération internationale. Des tentatives d'implantation du concept en Afrique de l'Ouest ont été réalisées au début des années 90. Depuis, les liens avec l'Europe et l'Amérique latine sont priorisés. En 1996, le RQVVS est par ailleurs devenu "Centre collaborateur de l'Organisation mondiale de la santé (OMS)"

 

Centre québécois collaborateur de l'OMS pour le développement de Villes et Villages en santé
État de situation

Depuis ses origines, en 1987, le Réseau québécois de Villes et villages en santé entretient des échanges soutenus avec des initiatives semblables ailleurs au Canada et dans de nombreux pays du monde, de même qu'avec l'OMS. Au début, les échanges ont été particulièrement intenses avec l'Europe où le mouvement des Villes en santé a connu sa première impulsion officielle à l'initiative du bureau européen de l'OMS, qui en a fait un programme majeur dès 1987. Le Réseau québécois a été notamment un partenaire principal, avec la France, la Belgique et la Suisse, dans la création d'un réseau international francophone, informel mais très actif. Une autre implication majeure au plan international au cours de cette période aura été un projet de trois ans pour appuyer le développement de Villes en santé en Afrique francophone.

En 1996, ces activités internationales furent reconnues par l'Organisation mondiale de la santé et l'Organisation panaméricaine de la santé qui octroyait le statut de Centre collaborateur à une association constituée du RQVVS et de l'Université Laval (Groupe de recherche et d'intervention en promotion de la santé). Le Centre est co-dirigé depuis par les Dr Michel O'Neil, professeur titulaire à la Faculté des sciences infirmières de l'Université Laval, et Réal Lacombe, coordonnateur du Réseau. Le Centre est l'un des sept au monde, dont deux sont situés en Amériques, dans le domaine des Villes en santé.

Le mandat particulier du Centre collaborateur s'articule autour de quatre éléments principaux :

1. Participer à l'élargissement des réseaux de circulation de l'information sur les Villes et Villages en santé à l'échelle internationale, nationale et locale.

2. Développer des programmes individuels et de groupe pour l'assistance-conseil et la formation dans le domaine des indicateurs, stratégies, approches et méthodes sur les Villes et Villages en santé.

3. Participer à un partenariat Nord-Sud pour le développement de programmes de formation de 1er, 2è et 3è cycles en promotion de la santé.

4. Développer des projets de recherche pour valider du matériel éducatif, de communication, de gestion de projet, de même que des indicateurs et des expériences de concertation intersectorielle et de participation communautaire.

À défaut d'un bilan exhaustif, voici un aperçu des réalisations du Centre au cours des quatre dernières années :

  • Accueil de centaines de visiteurs étrangers en voyage d'études, individuellement et en groupe, provenant de tous les continents et notamment d'Europe (France, Suède, Belgique, Hollande, Russie…), d'Afrique (Sénégal, Mali, Zaïre…), d'Asie (Japon, Malaysie…) et des Amériques (Canada, Etats-Unis mais surtout Brésil, Mexique, Colombie, Pérou…). Outre des intervenants locaux de municipalités ou de la santé, le Centre a reçu des universitaires, des hauts fonctionnaires de santé  et plusieurs représentants d'organismes nationaux et internationaux (ex. la Fondation Kellogg ou encore l'Organisation panaméricaine de la santé).

  • Collaboration soutenue avec le service de coopération internationale du MSSS.

  • Participation à plusieurs congrès et séminaires internationaux et nationaux en promotion de la santé ou spécifiquement sur Villes et Villages en santé particulièrement au Canada, en Europe (Suisse), en Afrique ( Tunisie) et en Amérique latine (Brésil, Mexique, Cuba, Porto Rico…).

  • Échange continu d'information et de documentation, par téléphone, courrier ou liens Internet, avec les autres réseaux de villes ou de communautés en santé dans le monde, réseaux qui regroupent maintenant plus de 3000 municipalités.

  • Publication de neuf monographies, en trois langues.

  • Création d'un site Internet propre au Centre (en voie de reconstruction).

  • Mise en réseau, sur Internet, de plusieurs documents destinés au Réseau québécois mais rendus accessible internationalement, notamment le répertoire des projets québécois et une boîte à outils pour la gestion des projets. 

  • Organisation d'événements internationaux comme la rencontre des réseaux de villes/communautés en santé d'Amérique du Nord (1996), la réunion du conseil d'administration de l'Union internationale en promotion et éducation pour la santé (1999) et le 3ème Congrès des responsables locaux de santé des Amériques (2000).

  • Assistance-conseil pour la création de réseaux de villes/communautés en santé, notamment en Acadie, en France et au Brésil.

  • Accueil de plusieurs stagiaires étrangers, notamment de France et du Brésil.

  • Participation à des séminaires de formation en Amérique latine.

  • Intégration des approches et méthodes de villes/communautés en santé dans les programmes de formation d'étudiants étrangers, notamment à l'Université Laval.

  • Collaboration avec l'Organisation panaméricaine de la santé pour la révision des programmes de formation en promotion de la santé.

  • Participation continue à la rédaction du bulletin Research for Healthy Cities de l'Université de Maastricht, au Pays-Bas (également centre collaborateur de l'OMS).

  • Participation à un groupe de travail international de l'OPS pour l'élaboration d'indicateurs de santé des communautés et le développement de la recherche évaluative (notamment avec l'Université du Nouveau-Mexique).

  • Réalisation d'une recherche évaluative sur la mise en œuvre du mouvement Villes et Villages en santé en Afrique francophone.

En somme, les activités du Centre collaborateur ont été très nombreuses et variées. Au cours de ces dernières années, elles se sont progressivement concentrées sur la coopération et les échanges avec l'Amérique latine, particulièrement le Brésil, où l'intérêt et la demande vont croissant. C'est d'ailleurs ce qui a amené la tenue du 3ème Congrès des responsables locaux de santé des Amériques à Québec, en mars 2000. Cet événement, qui a accueilli plus de 600 participants d'une vingtaine de pays, aura occupé une bonne partie des énergies du Centre pendant les deux années qu'ont nécessité sa préparation. Un document majeur, la Plate-forme de Québec, en est issu et est diffusé dans tous les pays des Amériques. Les retombées s'annoncent déjà, avec des demandes de plusieurs pays, comme par exemple la Colombie et le Pérou.

Finalement, la désignation initiale de quatre ans ayant pris fin ce printemps, une demande de renouvellement est en préparation, avec l'assurance verbale du directeur de l'OPS lui-même, Sir George O. Alleyne que la réponse sera positive. Pour le prochain mandat, l'Institut national de santé publique deviendra le troisième partenaire, avec le Réseau québécois de Villes et Villages en santé et l'Université Laval.

Réal Lacombe
Québec, 8 juin 2000

 

Conférence internationale
Santé 200030 septembre au 5 octobre 2000
Palais des Congrès de Montréal
www.sante2000.org

Site du RQVVS: http://vvs.neomedia.com