L'Aéroport de Québec est né:
« Tasse-toé mon’oncle! »

par Benoit Routhier

Aéroport de Québec (ADQ), l'organisme qui est désormais chargé de la gestion de l'Aéroport international Jean-Lesage en remplacement du gouvernement fédéral, ne doit pas devenir une niche tissée de fils d'or pour des hommes d'affaires désireux de se rendre à la retraite sans trop d'efforts, tout en s'assurant d'une valeur ajoutée à leur régime de rentes!

Je veux bien reconnaître les mérites de certains personnages qui travaillent sur ce dossier depuis plus d'une décennie, mais la région de Québec a besoin d'un aéroport qui prendra son essor d'ici 10 ans tout au plus. Et je crains fort que certains des dirigeants actuels n'aient plus assez de fougue et peut-être pas assez de compétences pour assurer cette expansion nécessaire. Cette remarque n'enlève rien au mérite de ces personnes et je veux bien qu'elles continuent à œuvrer au sein de l'Aéroport de Québec, mais, de grâce, qu'elles s'entourent d'une équipe jeune, compétente, dynamique, qui saura se rendre là où il faut aller pour faire toutes les pressions et représentations nécessaires pour que, désormais, notre aéroport n'ait plus d'international que l'adjectif qui fait partie de son nom.

Le président-directeur général de la Société du Centre des congrès de Québec, M. Claude Pinault, a plus d'une fois déploré les lacunes de notre aéroport. La mauvaise desserte aérienne est un sérieux handicap au développement du Centre des congrès. Il faut augmenter, de toute urgence, le nombre de sièges des avions qui effectuent le trajet Montréal-Québec. En 1999-2000, ces vols ont vu leur nombre de sièges diminuer de 37% par rapport à l'année précédente. M. Pinault précise, par ailleurs, que les problèmes d'accès aérien ont causé une perte de 33% des efforts de vente pour le Centre des congrès. Ce n'est pas rien!

Il faudra des personnes bien préparées pour aller convaincre Air Canada de l'importance de développer Québec comme destination. Il faudra des gens qui n'ont pas froid aux yeux et qui comprennent bien les enjeux.

LE TOURISME

Mes propos valent tout autant pour l'industrie touristique. L'Aéroport de Québec devra s'atteler à la tâche de convaincre des compagnies comme
Air Transat de cesser de considérer la région de Québec comme un rang de campagne! Si c'est le Québec profond, comme le dit si bien le ministre libéral fédéral Pierre Pettigrew, c'est aussi la capitale québécoise et le deuxième plus important centre de la province. Et avec un bassin de population assez important pour exiger qu'Air Transat cesse de fuir. À chaque automne, les Québécois qui veulent aller faire du tourisme vers le Sud réalisent que cette compagnie aérienne a éliminé ses départs de Québec pour une ou plusieurs destinations soleil. Cette année, quelqu'un qui veut aller à Cuba à partir de Québec ne peut qu'aller à Varadero. Jusqu'à l'an passé, il y avait des vols pour Cayo Coco et Guardalavaca à partir de Québec. Pour la République dominicaine, si on veut un vol de Québec, on ne peut aller qu'à Puerto Plata et Punta Cana. Idem pour le Mexique. À partir de Québec, il n'y a plus que des vols pour Acapulco et Puerto Vallarta. Il y a peu d'années encore on pouvait, par exemple, se rendre à Ixtapa. Et, en plus de réduire les destinations, on réduit le nombre de sièges!

Pourtant, disent bien des agents de voyages, la demande reste forte pour des destinations comme Cayo Coco et Ixtapa. Ce ne sont là que des exemples.

LE FEU SACRÉ

Que voilà un autre beau travail de pression pour des gens dynamiques.

L'équipe d'Aéroport de Québec devra avoir le feu sacré et ne pas compter ses heures pour faire de notre aéroport, en grande collaboration avec la région, particulièrement les milieux d'affaires et touristiques, un aéroport digne de ce nom. Le gouvernement fédéral investit plus de sept millions $ dans l'aventure, il ne faut pas gaspiller cet argent public.

Comme le dit encore M. Pinault, l'ADQ ne devra pas se contenter de gérer, il devra devenir un acteur économique. Il devra défoncer des portes pour mieux foncer vers un avenir brillant.

ET LE TGV?

Pour rester dans le domaine des communications, relevons, comme l'a fait le maire de Québec, M. Jean-Paul L'Allier, le dossier du projet d'un train à grande vitesse (TGV) dans le corridor Québec-Montréal-Windsor.

Le maire de la capitale québécoise a raison de s'impatienter. Dans les années '80 un groupe de travail, qui comprenait entre autres des représentants des gouvernements du Québec et de l'Ontario et du gouvernement fédéral, a coûté plusieurs centaines de millions $ en études sur ce fameux projet. D'année en année on donnait quelques chiffres en pâture aux journalistes trop curieux qui voulait savoir où le projet était rendu. De décision, jamais! Les années et même les décennies passent, les millions $ sont dépensés en études, et jamais de décision.

Bien sûr un TGV reliant Québec, Montréal et Windsor signifie un coût astronomique. Mais tout en réalisant ce projet, on pourrait améliorer les infrastructures ferroviaires canadiennes et ainsi désengorger nos autoroutes des milliers de camions de toutes sortes qui sont devenus de vrais dangers pour l'automobiliste. En plus, ces lourds camions, certains sont devenus de véritables trains, détruisent à qui mieux mieux les routes. Avons-nous évalué les coûts de reconstruction de ces autres infrastructures?

UNE CAPITALE OUVERTE

Des services aérien et ferroviaire grandement améliorés signifieraient que la capitale québécoise serait appelée à recevoir de plus en plus de monde: touristes et gens d'affaires. De tous pays, de toutes cultures, de toutes langues. Le maire L'Allier, devant les États généraux sur la langue française, a suggéré la mise en place d'un affichage public multilingue pour les touristes. On ne peut qu'abonder dans le même sens.

Mettons-nous à la place d'un Japonais ou d'un Scandinave ou d'un simple Américain qui visite le Vieux-Québec. Il y a de fortes chances qu'il ne sache pas le français. Alors comment peut-il retourner chez lui avec une bonne connaissance de la ville et de son histoire? Un affichage public multilingue permettrait, dit M. L'Allier, de  «révéler la dimension internationale de la capitale», ce qui aurait des répercussions. Et partant, cela aiderait notre économie.

Cela suppose des amendements législatifs? Qu'à cela ne tienne. Cela fait partie de la tâche des élus.