BioContact 2000
Un record d'affluence

par Jean Rousseau

 

La 7ème édition de BioContact a connu un achalandage record. Plus de 1100 intervenants du monde de la biotechnologie se sont réunis du 4 au 6 octobre 2000, au Château Frontenac de Québec. Les investissements en biotechnologie ont atteint des sommets cette année. Curieusement, cette manne semble échapper aux entrepreneurs québécois. Ils éprouvent d’énormes difficultés à obtenir des financements équivalents à ceux de compagnies américaines.

L’éclatement de la bulle spéculative en février 2000 entourant les titres Internet a permis au secteur de la biotechnologie d’offrir les meilleurs rendements boursiers cette année. Pour de nombreuses compagnies de biotechnologie, un concept et la promesse de profits sont tout ce qu’elles ont à offrir. Le marché boursier et les financiers semblent prêts à attendre. Cette patience a toutefois ses limites. Une compagnie de haute technologie comme Nortel Network Corp. a vu fondre la valeur de son titre boursier de plus de 40%, le 26 octobre 2000, quand elle a annoncé qu’elle ne rencontrerait pas ses prévisions de profits au troisième trimestre.

DES OPPORTUNITÉS POUR LA BIOTECHNOLOGIE

Avec le vieillissement de la population et une consommation accrue de médicaments, les compagnies de biotechnologie se voient offrir de magnifiques opportunités. Les grands groupes pharmaceutiques comptent en effet sur ces compagnies pour acquérir de nouvelles molécules. Incapables de générer un nombre suffisant de drogues pour remplacer celles dont le brevet vient à échéance, les pharmas vivent des moments d’anxiété. Pour Bristol Myers Squibb, par exemple, la perte d’exclusivité sur la drogue anticancer Taxol signifie des baisses de revenus importantes. Le Taxol a généré, à lui seul, des revenus de plus de 1 milliard $US cette année.

Ces profits réjouissent les actionnaires, mais ont aussi fait rager les personnes du troisième âge lors de la dernière élection américaine. Le candidat démocrate Al Gore a pris note et annoncé qu’il y aurait une forme de contrôle des prix des médicaments pour permettre aux citoyens recevant l’assurance sociale (Medicare) de pouvoir se les offrir. Au Québec, le virage ambulatoire a diminué la durée moyenne des séjours dans les hôpitaux. Il a toutefois eu pour effet d’entraîner une hausse de la consommation des médicaments et des budgets consacrés aux médicaments. Dans un contexte de coupures, le prix élevé des médicaments est pointé du doigt.

Durant BioContact 2000, le président de Merck Frost Canada, André Marcheterre, faisait remarquer que l’on blâme les compagnies pharmaceutiques pour le coût élevé des médicaments. Il ajoute que ¨le système est improductif. Personne ne mesure. Personne n’est là pour vérifier et consigner si vous allez mieux, quel traitement a été choisi et combien cela a-t-il coûté.¨ Pour lui, il est essentiel que les compagnies pharmaceutiques financent et s’impliquent avec les différents acteurs du système de santé dans des projets pilotes de gestion thérapeutique. Cela permettra ultimement aux compagnies pharmaceutiques d’éviter que leurs nouvelles drogues ne trouvent preneurs.

UNE OPÉRATION ¨BioEntrepreneur¨ RÉUSSIE

De nombreuses rencontres ont lieu durant BioContact. Cette année encore des délégations commerciales sont venues spécifiquement pour l’événement. On comptait des représentants du Royaume-Uni, de la Bavière, de la France et de la Corée du Sud. Pour faciliter les échanges entre participants, des cocktails et soupers sont commandités par des firmes d’avocats ou de courtage. Une initiative fort appréciée fut l’œuvre de Marc Bossé, président de Viridis Biotech, et Hugo St-Laurent, président de SiliCycle.

Jeunes entrepreneurs, ils connaissent les difficultés à pénétrer les réseaux influents. Pour faciliter ces rencontres entre entrepreneurs et autres intervenants de la biotechnologie, ils ont offert une soirée intitulée ¨BioEntrepreneur¨. Située au Centre d’interprétation de Place Royale, la rencontre a attiré près de 300 personnes. Au 4ème étage, le DJ Mole, de Vancouver, faisait vibrer la foule sur de l’intelligent dance music, un son minimaliste. Dans les voûtes, un petit bar offrait de délicieux single malt écossais, gracieuseté du consulat du Royaume-Uni. ¨Place Royale est un lieu de commerce depuis plus de 300 ans. Nous avons voulu créer une opportunité de rencontrer des gens importants, de façon assez inusitée¨¨, explique Marc Bossé. Pari tenu, car la soirée a vu s’échanger numéros de téléphones, conseils et de nombreuses visions d’avenir.

ATTENTION AUX MIRAGES

Les investisseurs individuels ne commencent qu’à distinguer les différents types de compagnie composant le secteur des biotechnologies, selon David Cameron, analyste à la Banque Nationale. Génomique, protéomique, bio-informatique, réalisation d’étude de médicaments pour des phases cliniques, système de libération contrôlée, synthèse de drogue, vérification de masse de composés prometteurs (high-throuput screening) thérapie génique… en passant par les tests diagnostiques, la biotechnologie est une galaxie de spécialités. La difficulté des investisseurs consiste à attribuer une valeur concrète à des retours futurs pour des technologies nouvelles et peu comprises.

Un article récent de la revue financière Barron’s (du 13 novembre 2000), intitulé ¨Est-ce que les biotechs pourraient devenir les prochains pointcoms du marché?¨ par Michael Shaoul, questionne l’engouement actuel pour les titres de biotechnologie. La surévaluation des titres est à son avis un danger.

Certaines technologies comme la génomique se présentent comme une nouvelle façon de développer des drogues. Leur modèle suppose l’identification d’un gêne (récessif ou dominant) impliqué dans une maladie. Par la suite la protéomique permettra d’identifier les protéines responsables. Les cibles étant connues, on pourra alors développer une médication appropriée. David Chin, de la firme PriceWaterHouseCoopers, a rappelé lors de sa présentation que l’on connaît bien la protéine responsable de l’anémie falsiforme depuis plus de 30 ans. Hélas, il n’y a toujours pas de médication disponible pour cette maladie.

Les promesses de nouveaux modèles d’affaires ne peuvent remplacer la vente de produits. Le secteur des compagnies offrant des services sur Internet a été la victime des attentes irréalistes qu’il avait suscitées. Les compagnies de biotechnologie feraient bien de ne pas l’oublier.

BioContact de plus en plus international

La 7e présentation de BioContact, les 4, 5 et 6 octobre dernier, aura aussi permis de consacrer la puissance de rayonnement international acquis par ce rendez-vous annuel des intervenants du milieu de la biotechnologie et des sciences de la vie. Cette année, 50% des quelque 1 100 participants venaient de l’extérieur du Canada. Des missions du Royaume-Uni, de la France, de la Bavière et de la Corée du Sud étaient officiellement présentes. Beaucoup plus qu’un événement québécois, BioContact Québec est devenu un endroit où des entreprises de partout à travers le monde viennent faire des affaires et signer des ententes de partenariat. Une des nouveautés de cette année est un site Internet qui présente plus de 500 profils corporatifs et plus de 120 présentations d’entreprises biotechnologiques: www.biocontact-online.com