Vrako propose une solution mondiale au problème du transport de l’eau

par Vincent Doyon

 

L’eau recouvre environ les deux tiers de la surface planétaire. Considérée trop souvent comme une ressource inépuisable, elle est essentielle à la vie de tout être humain. Cependant, le développement de la société est la cause d’un nombre incalculable de sources polluées, si bien qu’aujourd’hui, plus de 40 000 personnes meurent quotidiennement de maladies reliées à la consommation d’eau impropre.

“ Les sources les plus pures se situent majoritairement sur des terrains montagneux, alors que la population tend à s’établir sur des terrains plats et des vallées. Le transport de l’eau est donc devenue de plus en plus compliquée et il est difficile d’empêcher les bactéries de s’y installer ”, précise Marc Grondin, l’un des trois associés à la tête de Vrako.

“ Le système mis en place par Vrako est plus qu’une invention, c’est une innovation universelle puisqu’elle offre une alternative aux deux moyens de transport de l’eau inventés par l’homme jusqu’à maintenant, soit la bouteille et l’aqueduc. Le concept consiste à livrer une eau de qualité, directement de la source au verre du client, sans altérer les qualités de fraîcheur et de salubrité de l’eau naturelle puisée à la source accréditée.  C’est de l’eau livrée en vrac, d’où le nom de la compagnie: Vrako”, poursuit-il, de son bureau situé dans le même édifice que l’INRS-Eau, à la frontière ouest du Parc technologique du Québec métropolitain.

L’eau de source est transportée dans un camion spécialement aménagé pour la conserver à une température de 4ºC. Pourquoi cette température? Tout simplement parce que c’est à ce niveau que les bactéries cessent de se propager. Par la suite, l’eau est livrée au client à l’intérieur d’un réservoir de 100 litres, installé à l’extérieur du bâtiment.  Ce réservoir breveté permet de toujours conserver l’eau à 4ºC, malgré les variations climatiques.  Testé à maintes reprises dans le rude climat hivernal du Lac-Saint-Jean, le réservoir a résisté à une température de –40ºC alors que son contenu est demeuré à 4ºC. Puis, grâce à un système de pompe à basse pression, l’eau est dirigée directement à l’évier, plus précisément à un petit robinet installé parallèlement au robinet principal. 

Pour une industrie, le système est installé aux fontaines sur place, afin de ne pas déroger aux habitudes de consommation des employés.  Étant donné que le système est conçu pour fonctionner en circuit fermé, plus besoin de changer les grosses bouteilles de 18 litres et laisser entrer la poussière par le trou ainsi créé.  “ L’eau est toujours fraîche, froide et propre ”, confirme M. Grondin.

Plusieurs entreprises créées il y a plusieurs années disposent d’un système d’aqueduc qui peut être victime de bon nombre d’agents contaminants.  Investir pour le remettre au goût du jour peut s’avérer très coûteux…

“ En plus du marché résidentiel qui comporte beaucoup de potentiel, spécialement les propriétaires d’une deuxième demeure, il y a le marché industriel qui répond excessivement bien à nos sollicitations. 

“ En ce qui concerne la facturation, le camion est muni d’un compteur permettant de calculer le nombre exact de litres déversés dans le réservoir du client et on s’entend sur le prix du litre au moyen d’un contrat.  On peut vendre le produit ou encore avoir des options de location-rachat. ”   

À LA RESCOUSSE DU TIERS-MONDE

L’eau en bouteille n’est pas donnée et seules les civilisations industrialisées peuvent se permettre un système d’aqueduc. Que reste-t-il pour le reste de la population mondiale?

“ L’eau potable est le plus grand vecteur de maladies dans le monde.  C’est plus qu’une question environnementale, c’est une question de santé...  16 millions de gens par année meurent après avoir consommé de l’eau non-potable. De plus, on ne meurt pas immédiatement après avoir consommé; on est tout d’abord malade pendant une période plus ou moins prolongée... Ce qui est encore plus dramatique, c’est que plus de 40% des victimes sont des enfants ”, tiens à souligner Marc Grondin.

“ En ce qui concerne l’exportation, il n’y a rien de plus dispendieux que de transporter de l’eau par avion ou par bateau. Le problème est donc la distribution de la source à la population qui se trouve souvent à un endroit incompatible avec cette source.

“ Autre facteur important : dans les pays qui ont atteint leur indépendance depuis la Deuxième Guerre Mondiale, les grandes capitales et les grandes villes possèdent un réseau d’aqueduc qui avait été installé par les nations impérialistes du temps, telles que la France, la Grande-Bretagne ou l’Allemagne.  Alors que ces systèmes sont restés les mêmes, les pays ont connu une croissance démographique extrêmement importante.  Résultat : le système se retrouve aujourd’hui au centre de la capitale tandis que les banlieues ne sont pas alimentées. 

“ Il faut donc aller chercher de l’eau à l’extérieur, parcourir des distances importantes et ramener l’eau de source à l’aide de bouteilles qui ne sont pas adéquates. Nous croyons donc que notre innovation serait une alternative qui permettrait d’amener de l’eau à ces populations. ”  

PARTENARIAT AVEC L’ONU?

Marc Grondin possède une expérience considérable au niveau militaire, ce qui lui a permis de prendre connaissance de certains programmes mis de l’avant par l’Organisation des Nations Unies (ONU). “À l’an 2000, le World Food Program a nourri 83 millions de personnes dans 83 pays.  Cette entreprise à but non-lucratif consiste à fournir de la nourriture aux populations qui sont en état de famine suite à un désastre naturel. Par contre, le pire frein à cette action humanitaire est le manque d’eau. C’est certain, nous contemplons la possibilité de rencontrer les gens responsables de ce programme pour développer une entente permettant de transporter de l’eau à leur usage. C’est dans nos plans à moyen terme. ”

Petite entreprise située au Lac-Saint-Jean, Vrako est en opération depuis 1994. Elle a été fondée par deux frères, Clermont et Normand Tremblay, de Saint-André-du-Lac-Saint-Jean. Inventeurs et concepteurs du projet, ils se sont associés à Marc Grondin l’année dernière. Après avoir centré ses efforts sur la R&D, la compagnie a procédé à une mise en service de 125 appareils destinés aux secteurs résidentiel et industriel. La clientèle, provenant majoritairement du Lac-St-Jean, a réservé un accueil favorable à l’innovation.

“ La phase pré-commerciale est maintenant terminée et nous visons maintenant une expansion à l’extérieur de la région du Lac-Saint-Jean, plus particulièrement dans les grands centres tels que Québec. Cela nécessite un investissement important; c’est pourquoi l’étape où nous sommes en ce moment en est une de recherche de financement.  Nous recherchons un partenaire qui voudrait s’associer avec nous.