PROFIL D'ENTREPRISE

Le Service aérien gouvernemental de Québec
Un leader dans le combat des feux de forêt sur la planète

par Vincent Doyon

Un feu de forêt se déclenche en Argentine. Très vite, il devient hors de contrôle. Les autorités en place n'ont pas le choix; elles doivent obtenir de l'aide de l'extérieur. D'où provient cet appui? Des « pompiers du ciel », du Service aérien gouvernemental de Québec (SAG). Cette situation se produit à chaque année et elle n'est pas exclusive à l'Argentine. Depuis sa fondation officielle en 1960, le SAG s'est bâti une réputation d'excellence au pays et à travers le monde. Sa flotte imposante se compose de 14 avions-citernes:

  • 8 avions de type CL-415;

  • 2 avions de type CL 215 T (pour turbo);

  • 4 avions de type CL-215 P (pour piston).

La « vedette » de cette flotte, le CL-415, peut effectuer des prouesses remarquables: en effleurant un point d'eau, il peut recueillir jusqu'à 6 130 litres d'eau en 12 secondes seulement! Sa vitesse de croisière est de 343 km/h.

Maintenant, le Québec peut compter sur les seuls avions conçus spécialement pour combattre les incendies forestiers au monde. Beaucoup de chemin a été parcouru depuis que des hélicoptères étaient chargés de réaliser la même mission!

BOMBARDIER À L'ORIGINE DE L'EXPÉRIENCE INTERNATIONALE

Bien sûr, le Québec n'est pas la seule province canadienne à disposer d'une flotte d'avions-citernes. Elle est par contre la seule à posséder une expertise sur le plan international.

« Au début, Bombardier nous utilisait pour faire la promotion de ses avions, explique Michel Gagnon, directeur général du SAG. Nous avons donc réalisé des vols de démonstration et c'est de cette manière que tout a débuté sur le plan international. Nous avons établi des contacts, constaté des besoins… et vendu nos services de location. »

Le tout s'est effectué un peu à l'encontre de Bombardier, dont le but premier était de vendre des avions. Ce sont plutôt les services de location qui ont retenu l'attention des acheteurs potentiels. Du moins, en ce qui concerne le SAG.

La maintenance, les pilotes, l'entretien… tout est inclus dans le contrat de location. De plus, advenant un bris d'équipement, la responsabilité de trouver un autre avion incombe au SAG. Une telle expérience s'est produite cette année à Los Angeles alors qu'un des deux avions sur place a connu une fuite de carburant. Les dirigeants ont jugé qu'il était moins dispendieux d'envoyer un autre avion là-bas, plutôt que de réparer celui qui était endommagé. Par la suite, ils ont décidé de laisser l'avion supplémentaire à Los Angeles, dans le cas de feux supplémentaires. Si la situation se présente, les Américains paieront la location de cet avion. Chaque situation est donc unique, le SAG doit se préparer à toute éventualité.

PENDANT LA SAISON DES FEUX

Du 1er mai au 31 août, soit pendant la saison des feux locale, il faut que les 14 avions de la flotte soient à Québec. La province, bien sûr, passe en priorité. Le contrat de base du SAG est conclu avec la Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU), qui est une organisation privée, à but non lucratif, menée par l'industrie forestière et le ministère des Ressources naturelles. Elle gère donc la disponibilité des 14 avions, du moins, pendant l'été. Pendant cette période, impossible d'aller à l'extérieur du pays, à moins que la SOPFEU en fasse la demande expresse.

« Par exemple, explique Monsieur Gagnon, nous avons eu beaucoup de feux au début du mois de juillet et le tout s'est calmé par la suite. La SOPFEU nous a alors demandé de nous rendre dans les autres provinces canadiennes. »

Tableau 1

Statistiques recueillies au cours des sept dernières années

  • Moyenne de feux de forêt par année au Québec: 850

  • Moyenne de feux nécessitant une intervention par année: 220

  • Heures de vol des pilotes par année: de 1 300 à 3 500

  • Superficie de terrain brûlé: de 1 000 hectares à 200 000 hectares

Il est donc extrêmement difficile de prévoir ce qui va arriver d'année en année.

APRES LA SAISON DES FEUX

Par la suite, le SAG est libre de louer ses services aux autres pays. La plupart du temps, les contrats sont signés pour plusieurs années. Cependant, sa mission première n'est pas d'aller éteindre des feux au-delà des frontières; il le fait uniquement parce qu'il possède l'équipement nécessaire et que, grâce aux profits générés par ces missions, il lui est possible de réduire les coûts d'extinction des feux au Québec.

Autre précision importante: les 14 avions ne peuvent pas quitter la base en même temps pour se rendre dans les autres pays. Pendant l'hiver, la tâche principale consiste à effectuer les inspections sur ceux-ci (inspections A, B ou C, selon le cas). Par exemple, une inspection de type C demande 3 000 heures de travail à un seul homme, et il y a plusieurs inspections par hiver. Cela demande donc beaucoup de temps. Au maximum, quatre avions peuvent s'absenter au même moment.

Finalement, lorsque les avions reçoivent l'accord pour partir, il faut tenir compte de plusieurs particularités inhérentes à certains pays, auxquelles l'équipe québécoise doit s'adapter. Par exemple, l'Argentine comporte une réglementation spéciale. Étant donné que le pilote et le co-pilote ne parlent pas couramment l'espagnol, un pilote argentin était assis entre les deux tout au long des vols et ce, même si la langue internationale officielle de l'aviation est l'Anglais. En effet, lorsqu'on éteint des feux de forêt, il faut s'attendre généralement à ne pas opérer près des grands centres, mais plutôt en région, où les habitants ne parlent que la langue locale. Dans ce cas-ci, le SAG était engagé par la province de Neuquen, qui défrayait le salaire du pilote argentin.

Autre exemple: le SAG n'a pas pu faire affaire avec le Chili en raison de sa réglementation trop stricte. Les Chiliens exigeaient que le pilote possède une licence du Chili, qu'il parle couramment l'espagnol et que le SAG s'associe avec une compagnie chilienne, entre autres. Il va sans dire que les négociations ont échoué.

DIFFÉRENTS FACTEURS

Quatre causes majeures peuvent empêcher le SAG de se rendre dans un pays en particulier.

1 : La saison des feux locale. Tel qu'expliqué précédemment, les pays qui connaissent une saison des feux se déroulant pendant la même période que la nôtre ne peuvent profiter de notre aide, sauf si la SOPFEU en fait la demande.

2 : Le budget dont dispose le pays. La plupart des endroits qui sont victimes de feux de forêt pendant l'hiver québécois sont des pays tropicaux donc, qui ne roulent pas sur l'or. Le budget est donc un facteur important. C'est ce qui explique pourquoi, pour l'instant, le SAG ne retournera pas en Argentine, malgré le fait que les Argentins ont été très satisfaits de ses services.

Le Mexique connaît le même problème. Bien qu'étant extrêmement bien organisé au niveau des installations, il doit s'abstenir et demander de l'aide seulement en cas d'urgence extrême. Même chose pour le Brésil.

Les pays plus fortunés, comme les États-Unis, peuvent procéder à la signature de contrats à long terme. « C'est la treizième année en ligne que l'on se rend en Californie, précise Monsieur Gagnon. On vient de renouveler pour cinq ans à l'aide d'une entente de principe. C'est-à-dire qu'ils ne sont pas obligés de recourir à nos services. À chaque année, on négocie l'entente spécifique (les dates et les coûts pour l'année en cours).

« Maintenant, poursuit Monsieur Gagnon, est-ce que le Québec et le Canada seraient prêts à aider financièrement un pays en difficulté à se protéger contre les feux de forêt, via une entente internationale? C'est une avenue possible, mais c'est loin d'être mis au point. »

3 : La distance. On peut comprendre qu'il serait peu économique pour le SAG d'envoyer des avions en Australie…

4 : La situation sociale. Les pays en guerre sont, bien sûr, exclus.

DES DANGERS PARTICULIERS

La Californie, l'un des principaux « clients » du SAG, comporte des particularités qui augmentent la difficulté des tâches à réaliser. Au Canada, il n'est pas difficile de s'approvisionner en eau, en raison des nombreux lacs sur le territoire. De plus, il est rare qu'on doive évacuer un village, encore moins une ville. La situation est loin d'être aussi évidente à Los Angeles…

On doit tout d'abord composer avec des feux de broussaille, qui se propagent à une vitesse effarante. De plus, la région de la Ville des Anges ne comporte que deux points d'eau majeurs: un réservoir d'eau potable situé au sommet d'une montagne et… l'océan.

« Aller ramasser de l'eau dans l'océan n'est pas quelque chose que les pilotes pratiquent à tous les jours, souligne le directeur général. Les vagues peuvent endommager les appareils. De plus, on doit les laver complètement au retour en raison de l'eau salée. »

LA VIDÉO « LES POMPIERS DU CIEL » DISPONIBLE SUR INTERNET

Depuis peu, les Internautes peuvent visionner la vidéo officielle du SAG, intitulée « Les pompiers du ciel ». Cette dernière est disponible en trois langues : français, anglais et espagnol.

Le but principal est, bien sûr, de faire connaître les services disponibles.

Tous les pays qui requièrent les services du SAG ainsi que les pays potentiels ont reçu cette cassette, de différentes façons. Au Costa Rica, par exemple, le SAG l'a fait parvenir à l'antenne commerciale du Québec en place. En Argentine, le ministre Joseph Facal, lors d'une mission non connectée au SAG, en a fait la promotion, et toutes les représentations du Québec à l'étranger sont au courant du dossier.

Il est possible d'aller consulter la vidéo à l'adresse suivante : www.tresor.gouv.qc.ca/service-aerien

 

Tableau 1
Endroits où l'équipe du SAG a effectué des interventions :

CANADA

ÉTATS-UNIS

AUTRES PAYS

Alberta

Arkansas

Argentine

Colombie Britannique

Californie

Chili

Manitoba

Caroline du Nord

Équateur

Nouveau-Brunswick

Caroline du Sud

Mexique

Ontario

Floride

Portugal

Saskatchewan

Maine

Turquie

Terre-Neuve

Tennessee

Croatie

Territoires du Nord-Ouest

Virginie

 


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Commerce Monde #33