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Le réseautage: un outil essentiel à l'intégration des immigrants, essentiel à leur intégration!

par Corine Markey

 

D'abord, je tiens à remercier le cyberjournal COMMERCE MONDE de me fournir l'occasion de partager mes réflexions sur le réseautage du point de vue d'une immigrante. J'espère que le tout favorisera une meilleure compréhension entre Québécois et immigrants. Je ne suis pas une spécialiste en matière d'intégration, mais mon parcours me permet de partager avec vous certaines choses à ce sujet.

Je suis moi-même immigrante et je crois que pour s'intégrer à sa terre d'accueil, il faut une bonne dose de confiance en soi, de débrouillardise, d'adaptabilité et d'écoute.

Je suis originaire de Belgique et je vis au Québec depuis sept ans. Au fil des ans, je me suis rendu compte que quitter son chez-soi pour venir habiter un grand centre urbain comme Québec ou Montréal pose parfois les mêmes défis pour une personne originaire d'un autre pays que pour un Québécois qui a grandi en région ou en milieu rural. Toutefois, lorsqu'on vient de l'étranger, il faut ajouter l'adaptation culturelle à tout le processus d'adaptation que suppose pareil déplacement. Le tout prendra des formes différentes selon que l'on est immigrant économique ou que l'on soit «tombé en amour», comme on dit ici, avec la Belle Province. Je suis dans ce dernier cas.

Les Québécois qui battent villes et campagnes en Europe francophone en vue de recruter du «beau monde» pour une éventuelle immigration ne peuvent tout nous dire sur le Québec durant une présentation de deux heures. Aussi, un voyage de reconnaissance avant le grand départ s'impose. Durant ce voyage de prospection, recherchez de l'information qui vous intéresse. Mon conjoint et moi avions consulté une base de données de journaux dans une bibliothèque. Nous connaissions les gens qui faisaient parler d'eux dans l'actualité d'ici avant même d'y venir! Il suffit ensuite de se procurer un bottin de téléphone pour trouver et retracer les coordonnées de ceux qui vous intéressent.

Après avoir quitté votre pays d'origine et rempli les formalités d'immigration, il n'y a pas de comité d'accueil à l'aéroport, à moins de connaître des gens qui habitent déjà ici. Des organismes vous aident dans la recherche d'un logement et d'un emploi (on a un aperçu de ces organisations, entre autres, dans le site Internet La toile du Québec). Si vous comptez démarrer une entreprise, il existe d'excellents ouvrages sur la question aux Publications du Québec. Au cours de cette étape, il est essentiel de créer des liens avec des Québécois et d'autres immigrants. Ce qui veut dire que même si vous en avez les moyens, n'allez pas vous installer dans une villa entourée d'une clôture de deux mètres! Choisissez un quartier où il fait bon vivre, où il est possible de créer des liens. C'est peut être un peu plus difficile avec la crise de logement actuelle, mais on peut y arriver. Nous avons eu la chance de passer notre première année au Québec dans un quartier sympa où une voisine m'avait littéralement adoptée. Cette personne m'a beaucoup appris: l'histoire de sa génération, comment fonctionne le système de santé, quel hôpital choisir, où sont les centres commerciaux, les écoles...

Pour faciliter l'intégration, vous pouvez aussi joindre une association de votre quartier ou participer aux activités de l'école de vos enfants, devenir membre de la chambre de commerce ou joindre un regroupement de femmes. C'est ce que j'ai choisi de faire dès mon arrivée en devenant membre du Réseau des femmes d'affaires du Québec. Appartenir à un tel réseau a ses avantages: non seulement vous n'êtes plus une inconnue pour votre banquier ni pour votre assureur, mais vous profitez en plus d'avantages monétaires - quand vous n'avez pas de dossier de crédit et que vous venez de l'étranger, ce n'est pas facile de se négocier un bon taux d'intérêt, d'obtenir une carte de crédit, et ainsi de suite - et de plein d'autres choses qui vous feront gagner beaucoup de temps.

Au cours des premières années, il vous faudra aussi éviter de demeurer en état de survie permanent. Les gens d'ici ont eux aussi de la difficulté à se trouver un emploi ou à faire démarrer leur entreprise. Il faut aussi savoir que bien que nous soyons au «Far West» - d'un point de vue européen, bien sûr -, les contacts ici se font avec style. Si vous êtes trop «cow-boy», on vous le fera sentir. Pour vous initier à l'art du réseautage, il existe d'excellents cours, bouquins et conférences. Mais rien de tel que la pratique. Selon ma compréhension et mon observation des choses, la manière d'entrer en contact avec les gens est différente ici par rapport à l'Europe. Même la posture est différente: bomber le torse lorsqu'on se présente ne convient pas au Québec. Une voix aiguë agace et l'arrogance, même si c'est pour cacher votre peur, est mal perçue. Tous ces petits détails, qui font partie de ce qu'on a appris là-bas, nous font passer pour «une maudite française» dès le départ.

L'intégration se fait par phases. Après un an, on fait le bilan et on se demande si on repart ou si on reste. On prend conscience que lorsqu'on dit «nous», on parle désormais des Québécois, on s'inclut donc à la population. Après cinq ans survient une autre crise, surtout si on a des enfants. Lorsqu'on retourne en Europe, on sent qu'on n'est plus vraiment Européen... pendant qu'ici, on aura toujours un passé et un accent qui nous rendront différents. La situation d'emploi de la famille joue aussi un rôle important.

Le Québec a besoin d'immigrants pour contrer son déficit démographique et certaines régions comme la ville de Québec mettent les bouchées doubles pour attirer plus de monde. Il y aura toujours une partie des immigrants qui repartiront après quelques années. Plusieurs le feront par frustration, parce qu'ils ne se sont pas bien intégrés… Je crois qu'il faut les aider afin qu'ils restent une fois arrivés. Parfois encore, c'est le ou la conjointe qui s'ennuie de son pays natal. Je crois que la mise sur pied de services de réseautage à l'intention des conjointes pourrait être un puissant outil de rétention, donc d'intégration. Il existe de nombreux organismes culturels fonctionnant avec des moyens trop limités qui ont de la difficulté à se faire connaître auprès des intéressées. La force du réseautage agit aussi bien sur les gens d'ici que sur ceux qui viennent d'ailleurs: j'en suis la preuve vivante!

En terminant, j'aimerais vous remercier de votre accueil chaleureux. Il arrive encore, après toutes ces années, qu'on me fasse sentir ma différence - le m... accent! - mais ce n'est pas bien méchant. Nous avons choisi le Québec notamment à cause de cette valeur de l'accueil, soyez-en fiers! Aujourd'hui, je possède une entreprise de création de vêtements sur mesure; nous donnons aussi des conférences sur l'art vestimentaire. J'estime mon intégration réussie, en grande partie à cause du réseautage. Et j'ai parmi mes clients bien des ex-Européens!

Je vous souhaite un bon réseautage multiculturel!

Corine Markey est présidente de

Créations de Mode à votre Image ( www.cmi.qc.ca )

 

(NOTE: Cet article de madame Markey était aussi paru récemment sur le site www.lisecardinal.com).


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Commerce Monde #38