Trois ans avec la SPEQM
Michel Lafleur partage son bilan

 

Devant la volonté du conseil d'administration de l'organisme de se rapprocher, il y a trois ans, des besoins à l'exportation des entreprises de la région de Québec, la décision fut prise de créer une Direction du développement des marchés. D'avril 1996 à mai 1999, Michel Lafleur s'est attelé à la tâche. Un recul sur le chemin parcouru depuis trois ans aide aussi à tracer les chemins de l'avenir. Et c'est pour aider, en ce sens, les entrepreneurs de la grande région de Québec, que nous avons tenu à rencontrer celui qui a de toutes pièces mis en place le service du développement des marchés de la Société de promotion économique du Québec métropolitain (SPEQM), qu'il vient d'ailleurs de quitter pour aller relever un autre défi.

Entrevue réalisée par Daniel Allard

"Tout était à faire. Le défi était stimulant et le moment était venu pour que la SPEQM se rapproche des besoins à l'accompagnement à l'exportation des entreprises, car ce créneau de services n'existait pas auprès des autres services publics - pas de manière aussi pointue - et il répond à un véritable besoin des entreprises", se rappelle-t-il. "Le défi était d'aller plus loin que de dire ou d'offrir des généralités. Et maintenant, la SPEQM est reconnue comme ayant cette capacité de répondre de façon pointue à des questions précises des entreprises."

Mais aux yeux de Michel Lafleur, les gens d'affaires de la région n'ont pas encore tous développé certains réflexes essentiels pour réussir à l'international: "Mon opinion générale à propos des gens d'affaires dans la région: on note une évolution très positive face à l'exportation. Cependant, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Ainsi, les entrepreneurs sont habitués d'aller vite et n'ont pas de temps à perdre avec les structures. Parfois, ils vont trop vite et agissent de façon instinctive. Ce qui provoque des insuccès, par manque de planification. De plus, j'ai remarqué qu'un certain nombre sous-estiment les difficultés. Ils "rêvent en couleur" et sous-estiment la préparation requise à l'international, où le succès instantané n'est pas la règle."

"...encore beaucoup de gens d'affaires,
même sensibilisés à la chose,
vont être hésitants
à investir dans de l'expertise spécialisée
et le développement d'une stratégie à l'international."

Si davantage d'entrepreneurs avaient recours à des spécialistes avant de s'engager, il croit qu'ils éviteraient des erreurs en tâtonnements qui incitent parfois à renoncer après avoir dépensé des sommes souvent considérables. "Face à la possibilité d'engager, pour quelques milliers de dollars, une aide extérieure, encore beaucoup de gens d'affaires, même sensibilisé à la chose, vont être hésitant à investir dans  de l'expertise spécialisée et le développement d'une stratégie à l'international. On ne va pas à l'international sans une stratégie bien préparée, avec au moins l'ABC d'un plan d'affaires. Investir 6 ou 12 000$ pour bien se préparer, c'est assurément de l'argent bien placé. Cela évite les surprises et elles peuvent être nombreuses! Malheureusement, c'est encore un problème majeur à faire comprendre dans la région", constate Michel Lafleur. Et ce, même si les besoins de nos PME restent essentiellement orientés vers les marchés américains.

Grâce au Répertoire (1) mis sur pied par la SPEQM depuis 1997, nous savons que la région compte actuellement 496 entreprises exportatrices et que 606 ont la volonté de le devenir ou cherchent à exporter vers de nouveaux marchés. Ensemble, le nombre total d'entreprises exportatrices ou intéressées à exporter atteint 904 firmes distinctes. "L'avenir de la croissance économique de la région réside essentiellement dans le succès de ce millier d'entreprises. Et de ce nombre, je dirais que 50 à 75 sont des entreprises matures à l'international, dont la majorité des ventes proviennent des marchés étrangers. Il reste donc beaucoup de travail à faire, puisqu'il existe encore un fort potentiel de développement de richesse au sein de la région", constate-t-il.

Avec ce travail de base, la phase d'identification de ceux qui font et qui veulent faire de l'exportation est un acquis. Quant à l'évaluation du potentiel concret de ceux qui peuvent développer des stratégie d'affaires sur les marchés internationaux, l'équipe de la SPEQM ne s'est par encore rendue jusque là.

La multiplication dans la région des activités de sensibilisation sur les marchés étrangers est un autre sujet de préoccupation sur lequel il tient à lancer un message: "On a atteint une certaine maturité à ce niveau là avec la gamme des intervenants en place. La prochaine étape est certes une meilleure cohésion entre les partenaires qui interviennent auprès des entreprises. Il importe de faire les efforts pour qu'il y ait une convergence maximale entre tous, afin de simplifier la démarche des entreprises dont je soupçonne fortement le penchant vers des approches pratiques centrées sur l'action." A titre indicatif, rappelons que le Centre de commerce international de l'Est du Québec  (CCIEQ), à lui-seul, a tenu plus d'une quarantaine d'activités du genre, l'an dernier.

"Mais je suis confiant que c'est dans cette direction qu'on se dirige. Il y a beaucoup de progrès qui ont été réalisés au cours des dernières années. Les récentes missions en Chine, en Belgique et en France, dirigées par le maire de Québec, sont d'ailleurs un exemple de collaboration régionale dont on pourra tirer profit et s'inspirer pour d'autres activités", poursuit Michel Lafleur.

Quel est son plus beau souvenir? "Mon plus beau souvenir, c'est la satisfaction de voir des jeunes développer leur entreprise qui reviennent te voir avec le succès au bout des doigts, comme par exemple Silicycle. C'est aussi d'avoir monté un événement comme Co-Entreprise, pour lequel nous avons fait déplacer dans le Maine quelque 140 gens d'affaires de l'Est du Québec, ce qui a représenté la plus importante délégation d'affaires de l'histoire du Québec à l'étranger. Finalement, c'est de savoir que la relève est d'excellente qualité au sein du service du développement des marchés de la SPEQM. Je quitte avec la satisfaction de savoir que Caroline Lepage et son équipe sont pleinement en mesure de livrer la marchandise qu'on voulait livrer aux entreprises, c'est-à-dire un service personnalisé, rapide et répondant aux besoins précis des entreprises."

"Idéalement, j'aurais voulu demeurer en poste une quatrième année pour maximiser tout le travail accompli", termine-t-il. C'est donc après une longue réflexion qu'il explique avoir accepté de relever un nouveau défi, suite à l'offre du ministère des Finances.

S'il laisse son poste à la SPEQM, Michel Lafleur ne délaisse pas pour autant la mission d'appuyer le développement du Québec sur la scène internationale. À titre de directeur de la Direction du développement du secteur financier au ministère des Finances, à Québec, sa priorité est actuellement de conseiller le gouvernement sur le dossier de l'avenir de la Bourse de Montréal. Ensuite, il attaquera en profondeur le dossier des fonds communs de placement et des centres financiers internationaux. Alors ne vous surprenez pas de le croiser dans un aéroport. "Je risque de me retrouver souvent à l'étranger", assure-t-il, la tête déjà à hauteur d'avion, dans son bureau du 30e étage de l'édifice du Radisson Gouverneur, au centre-ville de Québec.

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(1) Toujours selon le répertoire de la SPEQM, l'intérêt à exporter des entreprises selon le continent prioritaire - la même entreprise peut être intéressée par des continents différents - confirme l'attrait des marchés traditionnels:

Amérique du Nord: 204
Europe de l'Ouest: 186
Asie: 123
Amérique Centrale: 103
Amérique Latine: 92
Afrique: 64
Europe de l'Est: 52
Moyen Orient: 43
Océanie: 37