7e Forum francophone des affaires

Bathurst aura été le forum... des Américains!

par Daniel Allard

Après Québec, Dakar, Paris-La Rochelle, Maurice, Cotonou et Hô Chi Minh Ville, la francophonie des affaires donnait son 7e rendez-vous bisannuel à Bathurst, en juin. Pour les non-initiés, le FFA-USA était représenté en force - et oui, les États-Unis sont membres depuis l'an dernier du FFA - alors qu'à l'opposé, la faiblesse de la délégation provenant de la France laissait songeur. Invitant même la Francophonie d'affaires à se donner rendez-vous chez-elle en 2005, la délégation de plus de 40 gens d'affaires du Comité national des USA a littéralement fait de Bathurst le "Forum des Américains"!

Fondé lors du deuxième Sommet de la Francophonie, celui de Québec en 1987, le Forum francophone des affaires (FFA) a statut d'organisation internationale non gouvernementale. Son siège social est à Montréal et un Québécois, Florian Rompré, en est le secrétaire général international depuis plusieurs années. Malheureusement pour lui, le dynamisme du réseau du FFA repose largement sur les "Comités nationaux" FFA dans chaque pays, à qui, entre autres, est maintenant confié la responsabilité de coordonner le membership des gens d'affaires. A une question, lors de la conférence de presse de clôture du FFA de Bathurst, concernant le nombre de gens d'affaires que le FFA regroupait, Florian Rompré n'a pu que se résoudre à expliquer que lorsque jadis son secrétariat international centralisait le membership, jusqu'à 2 500 membres figuraient sur les listes, mais que maintenant, il ne le sait pas! "Chaque Comité national se charge maintenant de renouveler ses membres et tous ne nous tiennent pas au courant. Franchement, je ne peux pas vous dire combien de membres nous représentons actuellement à travers la Francophonie, nous n'avons pas fait ce décompte", a-t-il confirmé.

FORTE PARTICIPATION DES USA

Du dynamisme, ce n'est sûrement pas ce qui fait défaut du côté du jeune Comité national des États-Unis. Le FFF-USA existe depuis environ un an et a ouvert une permanence à Lewiston, au Maine. "Lorsqu'ils ont fait une demande d'adhésion, nous n'avons pas pu faire autrement que de les accueillir, à la condition qu'ils acceptent que tout se passe en français. Mais ils ont un statut de membre observateur sans droit de vote, puisque leur gouvernement ne fait pas partie des pays membres de la Francophonie. Ce n'est pas un précédent. C'est un cas similaire au comité FFA de Pondichéry en Inde et de celui du val d'Aoste en Italie", explique-t-on au secrétariat international.

La directrice exécutive du FFA-USA, Elizabeth Dodge, aura réussi l'exploit d'amener avec elle une délégation d'une quarantaine de personnes. En fait, les kiosques des Américains représentaient, à eux-seul, environ un sixième (1/6) de l'espace total de l'exposition commerciale qui occupait aussi le Centre K.-C. Irving de Bathurst.

Un autre espace tout aussi imposant était par ailleurs occupé par le gouvernement de l'Ontario et ses agences. La visibilité ontarienne avait comme première justification le fait que la Province souhaite recevoir en ses terres la tenue du prochain Rendez-vous des gens d'affaires francophones du Canada, en 2001. Ce qui, semble-t-il, lui aurait été confirmé à Bathurst. Soulignons que Bathurst a aussi accueilli l'édition 1999 de l'événement canadien, pendant les trois jours précédant le FFA international. Des raisons de logistique ont empêché les deux événements de se tenir simultanément.

Le gouvernement du Québec, qui avait choisi une stratégie différente, n'avait pas de kiosque officiel à Bathurst. Il faut aussi savoir que le Québec invitait les gens d'affaires à Montréal, juste après le FFA, pour "Option Affaires au Québec", et que cette initiative aura réuni pendant une journée, dans un hôtel de la métropole, environ 150 participants.

Les gens d'affaires du Québec n'étaient pas moins présents pour autant à Bathurst. Capitalisant sur la force de son réseau des quatre coins du monde, le FFA aura attiré pour trois jours, dans cette petite ville néo-brunswickoise de 16 000 habitants, quelque 350 participants pour le 7e rendez-vous de son histoire. Et la diversité de la liste officielle des participants avait même quelque chose d'impressionnant. Immigrant, possédant son passeport français, un jeune homme d'affaires a, par exemple, tenu à s'inscrire comme Chinois! "C'est là que j'ai encore tout mes réseaux d'affaires", a justifié Robert Wang, en tendant sa carte d'affaires avec adresse à Beijing. Preuve que la Francophonie mène à tout!

Les quelque 50 Québécois présents auront aussi brassé des affaires avec une centaine d'autres Canadiens, les 31 membres de l'imposante délégation sénégalaise, les non moins imposants 30 Vietnamiens, les Bulgares, Maliens, Roumains, Libanais, Mauriciens, Belges... en tout des gens d'environ 25 pays.

BATHURST FAIT NAITRE UN "FFA-ATLANTIQUE"!

Parmi les faits saillants du 7e FFA, notons l'initiative des gens d'affaires de la Province hôtesse de demander la création d'une section régionale du Comité national canadien, qu'ils appellent déjà le "FFA-Atlantique". Jimmy Abud, un des plus fervents promoteurs de cette idée, souhaite même officialiser le tout en présence du Secrétaire général de la Francophonie, lors du Sommet de Moncton, début septembre.

 

LE 1er VOL PARIS-MONCTON N'A PAS ATTIRÉ LES FRANCAIS

Le FFA de Bathurst a également permis à l'aéroport de Moncton d'accueillir le premier vol international de son histoire! En effet, la compagnie Canada 3000 inaugurait, le samedi 12 juin, son vol hebdomadaire Paris-Moncton avec un avion bondé de gens d'affaires... d'Afrique et d'Asie!

Encore une fois, une poignée de gens d'affaires de France auront fait le déplacement pour réseauter au sein du FFA. La liste officielle des participants ne contenait que sept (7) ressortissants de la France! Questionné à ce propos, Florian Rompré a eu cette réponse surprenante: "Il faut savoir que les Français n'ont jamais beaucoup participé au sein du FFA... et entre vous et moi, cela arrange bien les gens d'affaires du Canada, qui peuvent plus facilement faire des contacts avec les Africains, sans avoir les Français dans le décor!"

Né à Québec, le FFA est semble-t-il resté une affaire du Canada. Il est facile de comprendre que le passé historique de la France dispense bien des gens d'affaires français d'avoir besoin d'un jeune réseau comme le FFA pour s'ouvrir des portes en Afrique ou en Asie francophone. Mais un tel désistement peut aussi représenter un handicap important pour la pérennité du FFA. D'ailleurs, le représentant du gouvernement du Québec, conseiller au ministère des Relations internationales, Michel Grégoire, n'a pas caché les questions que soulève l'avenir du  FFA au sein des autorités publiques. Lors de la plénière de clôture du mercredi matin, il a franchement et clairement soutenu que le FFA avait tout avantage à entreprendre des actions qui dynamiseront sa structure, surtout à la base, s'il veut pouvoir continuer de compter sur le soutien des gouvernements.

Un peu à l'image des bannières commerciales, le FFA devrait constituer un réseau de comités nationaux standardisés, ce qu'il n'est malheureusement pas encore. Bon exemple d'une structure à plusieurs vitesses: à peine la moitié des 52 pays de la Francophonie comptaient de leurs ressortissants à Bathurst; et seulement 17 des Comités nationaux étaient dûment représentés lors de l'assemblée du Bureau international du FFA, tenue le dimanche!

Avec ses 703 membres actifs de partout dans le pays, le Comité national sénégalais est montré en exemple. Celui du Canada, où la directrice générale Yvette Cogne n'a pas mis longtemps à s'y faire une réputation de "Dame de fer" de la Francophonie, fait aussi partie des acteurs dynamiques du réseau du FFA avec 250 membres. Ces deux pays ne sont pas la règle!

INTERNET À LA RESCOUSSE DU FFA?

Sans doute en accord avec cette analyse, Florian Rompré, fort d'un mandat tout juste renouvelé à la tête de l'organisme, ira d'ailleurs directement demander aux Chefs d'États et de gouvernements réunis en Sommet, début septembre, à Moncton, de lui confier un budget d'environ 1,2 million de $ pour financer le branchement Internet de l'ensemble de son réseau de comités nationaux du FFA: "Suite au projet-pilote très positif que nous venons de réaliser avec le Sénégal, il est tout à fait stratégique de poursuivre cette initiative et j'ai très bon espoir que le Sommet de Moncton répondra à nos attentes", a-t-il aussi fait savoir en marge de la conférence de presse.

Le secrétariat international du FFA possède déjà son propre site Internet (www.ffa-i.org). Mais les comités nationaux qui maximisent la technologie du net sont encore l'exception. En plus d'équiper les différents comités de son réseaux international, l'argent demandé servirait à la formation et à la création de contenu. Rappelons que rapidement après sa création, le FFA avait lancé sa Banque internationale de projets, sous forme de publications périodiques. Le développement du CEFFANET, le CEntre Francophone InterNET, pourrait effectivement décupler la force et l'intérêt pour un tel outil.

PROCHAINE ÉTAPE: FRANCO COM 99

Les gens d'affaires de la Francophonie auront une nouvelle occasion de  renforcer la francophonie économique, durant les trois jours de FRANCO COM 99, la Foire commerciale internationale qui se tiendra les 24, 25 et 26 août 1999, au Palais Crystal de Dieppe, Nouveau-Brunswick, en marge du Sommet de Moncton. INFO: Paul Farrah au 1-800-561-4446