Cette rubrique est mise à la disposition de chacune des Délégations générales du Québec à l'étranger. A tour de rôle, de Paris, Bruxelles, Londres, Tokyo, Mexico et New York, elles porteront pour le bénéfice des lecteurs de COMMERCE MONDE un regard stratégique sur le bout de planète qu'elles observent.


Le défi de l'Euro

Denis DeBellevalle
Délégué général du Québec à Bruxelles

Vieux rêve des fondateurs de l'Union Européenne, la monnaie unique est l'aboutissement des efforts consentis par les pays adhérants à la construction d'une Union Monétaire imaginée depuis 1968.

L'histoire de l'Europe monétaire commence en 1968 avec le rapport Werner qui prévoyait la création de l'Union Economique et Monétaire en plusieurs étapes. Dans les années 70, un premier projet fut élaboré et réalisé par l'Union Européenne avec l'introduction d'un système monétaire européen dans le cadre duquel toutes les monnaies nationales sont définies les unes par rapport aux autres dans une marge établie d'avance. En effet, ce système rassemblait les différentes devises européennes dans un seul panier de valeur, l'E.C.U., qui stabilisait les devises européennes dans une certaine mesure, tout en étant une base de calcul pour les échanges internationaux.

Les prochaines étapes se succédaient rapidement. En 1989, le rapport Delors établissait les fondements de la monnaie unique et le traité de Maastricht, en 1992, scella la base juridique de ce dernier et de l'Union Economique et Monétaire. La dernière étape fondamentale sera franchie le premier janvier 1999, avec la mise en circulation de l'euro en lieu et place de l'écu.

L'euro sera un catalyseur puissant
pour l'identité future de l'Europe
et une monnaie stable.

L'Union Européenne disposera donc avec la monnaie unique, l'euro, d'un instrument essentiel au développement économique capable de tenir tête aux changements conjoncturels et aux fluctuations boursières. L'euro sera un catalyseur puissant pour l'identité future de l'Europe et une monnaie stable.

Néanmoins, pour que l'euro soit un vrai catalyseur, l'Union Européenne a créé des critères de convergences strictes, qui permettront aux budgets nationaux d'additionner leurs actions dans le même sens et éviter des distorsions qui provoqueraient l'éclatement de la monnaie unique. Les critères de convergences retenus à Maastricht reposent sur des principes économiques en tenant compte de l'état financier de l'adhérant (stabilité des prix, situation des finances publiques et taux d'intérêts à long terme). Seuls les pays qui auront rempli les critères de convergences et qui s'appuieront sur une situation économique et budgétaire saine entreront de plein fouet dans le marché unique.

En ce qui concerne la Banque Centrale Européenne, elle entrera après le premier janvier 1999 dans sa phase opérationnelle, fonctionnera d'une façon indépendante et aura comme objectif principal de garantir la stabilité des prix et la stabilité monétaire dans toute l'Europe. Par ailleurs, la Banque Centrale a mis sur pied des mécanismes et des instruments pour subvenir aux dysfonctionnements possibles du marché unique. Soyons donc attentifs et ouverts à une nouvelle ère européenne en pleine mutation.

Soyons donc attentifs et ouverts
à une nouvelle ère européenne en pleine mutation.

Le Conseil Européen de Bruxelles a annoncé définitivement les pays qui adhéreront à l'euro le premier janvier 1999 (l'Allemagne, l'Autriche, l'Espagne, la Finlande, le Bénélux, la France, l'Irlande, l'Italie et le Portugal) et fixé les taux de changes bilatéraux entre les monnaies nationales. Il a en même temps nommé les membres du directoire de la Banque Centrale Européenne.

Une période transitoire de trois ans sera instaurée pendant laquelle chaque individu pourra choisir entre l'euro et/ou la monnaie nationale pour effectuer ses opérations scripturales (comptes bancaires, virements, paiements des impôts,...). Après le premier janvier 2002 le Conseil Européen prévoit une double circulation des billets et pièces en euro et en monnaie nationale, mais cette dernière sera progressivement retirée et supprimée au plus tard le 30 juin 2002.

L'Union Européenne des quinze sera une grande puissance économique à part entière avec près de 300 millions de consommateurs. Elle aura enfin une puissance monétaire et financière à la hauteur de ses possibilités économiques et jouera un rôle déterminant sur la scène internationale en tant que partenaire commercial des Etats-Unis et du Japon.

Ce rôle sera naturellement renforcé par la création de l'euro. En effet, d'une part elle stimulera la concurrence au sein de l'Europe et, d'autre part, il sera plus facile dans un marché unique d'investir, de consommer, de voyager et de travailler. La zone euro sera en définitive un pôle stable avec une monnaie d'envergure internatonale.

Ainsi, le passage au marché unique et à l'euro donnera aux entreprises, aux banques et aux consommateurs de nombreux avantages.

Ce ne sera pas uniquement une opération arithmétique, mais surtout une opération stratégique importante pour toutes les entreprises. Celles qui auront soigneusement et sur une base professionnelle, préparé le passage à l'euro, pourront bénéficier d'une position concurrentielle plus forte et d'un bénéfice plus grand grâce à des prix et des taux d'intérêts sans doute plus bas.

L'euro leur donnera la possibilité de mettre des stratégies européennes en place, d'accéder à de nouveaux marchés et de développer en même temps leurs activités. Le passage vers l'euro facilitera les opérations financières transfrontalières. L'absence de délais et de charges liés au change, devrait favoriser l'investissement des entreprises, la transparence du marché en Europe et l'accroissement de la rentabilité du capital. Par contre, cela engendrera des changements profonds dans toutes les structures de l'entreprise et l'obligera à mettre une stratégie efficace sur pied pour ne pas connaître un retard substantiel dans l'univers euro et son marché unique.

Un euro vaudra
environs
40 francs belges

Les consommateurs européens seront les derniers confrontés par l'introduction de l'euro. Le passage vers l'euro se fera plus en douceur grâce à la période de transition de trois ans et aux projets multiples organisés par l'Union Européenne. Cette derniére s'est fait un point d'honneur à garantir une protection plus large pour les consommateurs pendant la phase de transition. Et notons à titre informatif qu'un euro vaudra environs 40 francs belges (1,8181 $CDN).

L'avènement de l'euro marquera une étape cruciale dans le long processus d'intégration et de libération des économies européennes. Amorcé par le traité de Rome, au lendemain d'une guerre dévastatrice, ce long cheminement ne s'est pas fait sans écueils et remises en cause. Les prérogatives nationales et le scepticisme de certains États européens n'auront toutefois pu empêcher la réalisation de ce que certains visionnaires, tel Jean Monnet, considéraient comme la seule voie garante de paix et de progrès économique et social pour cette vieille Europe. Les entreprises québécoises dynamiques et bien préparées sont invitées à prendre avantage de ce nouveau marché unique.

 

Pour informations supplémentaires:

Raymond Marcil
Directeur Affaires économiques
Délégation générale du Québec

46 avenue des Arts, 1000 Bruxelles
Tel: 32.2.(0) 2. 549.59.22
Fax: 549.59.08
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