NORTECH FIBRONIC,
de l'INO jusqu'en Chine

par Denis St-Gelais

Avec l'acquisition récente d'une firme ontarienne et une autre transaction majeure en cours, Nortech Fibronic se prépare à devenir un des chefs de file dans le monde de la fibre optique.

Chercheurs à l'Institut national d'optique (INO), Claude-Adrien Noël et son associé Michel Bédard décident, en 1991, de participer au concours Devenez entrepreneur. Leur projet initial est de concevoir un thermomètre à fibre optique. Ce concours exige des participants qu'ils créent une entreprise fictive. Mais le projet qu'ils soumettent n'a rien d'imaginaire. Nortech Fibronic venait de voir le jour.

Après avoir remporté la première place aux trois niveaux de la compétition - municipal, régional et provincial - et obtenu ainsi une bourse de 25 000$, les deux hommes se lançaient définitivement en affaires. Durant les deux premières années d'opérations, Nortech Fibronic survit grâce à des contrats de développement de produits effectués pour le compte d'autres entreprises. Ce n'est qu'en juin 1993 que le thermomètre à fibre optique, le projet initial, est enfin au point. A partir de ce moment, la croissance de l'entreprise sera en constante progression. "Elle se situe présentement à plus de 100% et cela est possible grâce aux trois divisions de la compagnie: celle des capteurs, celle des télécommunications, où la croissance est la plus forte, et celle des capteurs optique. Mais aussi grâce à des investissements récents", confie Claude-Adrien Noël.

Une compagnie ontarienne déménage à Québec

Récemment, Nortech Fibronic a fait l'acquisition d'une compagnie ontarienne qu'elle a entièrement déménagée à Québec. "L'achat de Antel Optronics inc. est une récupération. Pour une fois, c'est le Québec qui ramène quelque chose chez lui. Le chiffre d'affaire était de 3,6 millions $ et nous n'avons fait l'acquisition que des actifs de ce groupe, sans nous embarrasser du reste", précise le président de Nortech. En effet, aucun des emplois ontariens n'a été conservé et l'usine a été entièrement déménagée à deux pas des locaux actuels de Nortech, situés sur la rue Saint-Jean-Baptiste, à Sainte-Foy. "Le matériel de l'usine est arrivé ici en pièces détachées, numérotées et réinstallées exactement de la même façon qu'il l'était en Ontario. Tout à fait comme un jeu de mécano", raconte-t-il sourire aux lèvres.

En améliorant la qualité des produits fabriqués par Antel et en accélérant leurs délais de production, Nortech a réussi à récupérer le principal client de l'ancienne entreprise qui, selon Claude-Adrien Noël, s'est montré très satisfait de la performance des nouveaux acquéreurs: "La digestion de la nouvelle filiale s'est avérée très facile. Les Européens avec lesquels nous sommes en contact ont été fortement impressionnés par notre capacité à intégrer aussi rapidement une nouvelle division à notre structure actuelle."

La Chine, notre plus important marché

Nortech Fibronic exporte à l'étranger environ 95% de sa production. L'Asie est son marché le plus important, suivi de l'Europe et de l'Amérique du nord. "C'est en Asie que nous faisons les meilleures affaires, explique le président de Nortech. La Chine, particulièrement, est notre plus important marché. Ce pays a un fabuleux potentiel de développement. Les rapports avec les Chinois sont par contre extrêmement complexes." Même si c'est surtout à travers Hong Kong que se font les contacts, pour Claude-Adrien Noël, la meilleure façon de transiger avec les Chinois est de le faire directement, sans intermédiaires. "Pour pénétrer le marché chinois, dit-il, j'ai pris des cours de chinois et de japonais. Pas pour connaître parfaitement ces deux langues, mais pour me rapprocher de ces cultures complexes.

Là-bas, c'est important de créer un réseau d'amitié et de confiance. Surtout en Chine, où une entente n'est qu'une base de départ des négociations. Avec eux, on ne sait jamais quand une entente est conclue. Il faut faire preuve de patience et de ténacité."

Au Japon , les choses sont plus simples. Même si ce pays représente le plus important compétiteur de Nortech Fibronic, les affaires s'y font plus facilement. "Le Japon a une façon plus américaine de fonctionner. Leur participation au G7 les y oblige, précise M.Noël. Pourtant, pour nous, c'est la Chine qui représente le défi le plus intéressant. C'est valorisant et cela peut être très lucratif d'y réussir une percée. N'oublions pas que ce pays représente quand même 50% de tout le marché asiatique."

Un travail d'équipe

Pour les dirigeants de Nortech, les employés représentent une grande force. De 40 à oeuvrer présentement au sein de l'entreprise, ils passeront probablement à 70 vers la fin de l'année. Un grand nombre d'entre eux sont des diplômés universitaires spécialisés dans la recherche. "Les employeurs ont souvent peur de s'entourer de gens plus intelligents et compétents qu'eux, avoue Claude-Adrien Noël. Pourtant, il faut comprendre que, dans une industrie, tout repose sur un travail d'équipe. Ici, chez Nortech, cette approche est fondamentale. Nous comptons bientôt mettre sur pied un projet d'ingénierie simultanée qui consistera à concevoir un appareil en mettant à l'oeuvre toutes les divisions de l'entreprise. Ce sera un véritable travail d'équipe et, si le résultat est concluant, cela débouchera sur la création d'un produit de qualité." Chez Nortech, on affirme que le succès ne se fait pas au détriment des employés, mais plutôt en stimulant leur créativité.

Depuis 1991, Nortech Fibronic est passée d'un budget initial de 25 000$ à un chiffre d'affaire annuel de plusieurs millions. Discret, l'homme d'affaires refuse de dévoiler le montant exact de celui-ci mais confie que, aujourd'hui, il paie beaucoup plus en impôt aux deux paliers de gouvernements que le montant dont lui et Michel Bédard ont disposé pour lancer leur entreprise. Et en plus, la croissance de Nortech est en plein essor...

En effet, ce qui excite le plus Claude-Adrien Noël ces temps-ci, c'est une affaire gardée complètement secrète, jusqu'à sa réalisation définitive : l'acquisition d'une nouvelle entreprise dont la taille est plus importante que celle de Antel et Nortech mises ensemble. L'affaire doit se conclure cet automne!

Pour améliorer sa mise en marché, la compagnie a par ailleurs installé des bureaux à Paris, Dallas et Toronto. Prochainement, deux autres s'ajouteront à la liste : un en Asie et un autre en Amérique latine. "La progression de l'entreprise sera encore plus grande dans le futur. En plus de cette transaction secrète, nous comptons bien acquérir une autre compagnie dont l'activité se situera dans un domaine limitrophe à la nôtre. Comme le dit mon associé, Michel Bédard, Nortech est une petite entreprise qui se donne des allures de grande", conclut l'homme d'affaires.

A la fin de l'entrevue, C.-A. Noël commençait une semaine de vacance bien méritée. Venant à peine d'arriver d'un séjour de plus de deux mois à l'étranger, il souhaitait que sa famille n'ait pas trop envie de voir du pays!