Organisation des villes du patrimoine mondial
L'Allier part, le Secrétariat reste à Québec

par Daniel Allard

 

"Pour ma part, j'ai déjà informé le présent C.A. que je ne solliciterai pas un autre mandat à la présidence de l'OVPM. Vous m'avez donné le privilège de présider notre organisation depuis sa création et je vous en remercie." Ainsi s'exprimait le maire de Québec, Jean-Paul L'Allier, dans son Mot du président du Bulletin de l'OVPM de juillet dernier.

Dans cette déclaration, qui n'était déjà plus une nouvelle en juillet puisque les intentions du maire L'Allier étaient  connues depuis longtemps, c'est plutôt la deuxième phrase qui demeure lourde de conséquences pour la ville de Québec. L'histoire de la création de cette organisation internationale, et surtout de l'installation de son siège social et de son secrétariat général, doivent énormément à la Ville de Québec, au Québec et au Canada. Le fait que le maire de Québec en assume la présidence depuis a permis de ne jamais soulever formellement la question de la permanence de ce siège à Québec. En fait, la Charte constitutive de l'Organisation des villes du patrimoine mondial, fondée à Fez, au Maroc, en 1993, est tout à fait muette à ce titre. C'est en fait le bon vouloir des membres et de l'Assemblée générale qui décident du lieu de localisation du secrétariat de l'OVPM.

Il y a quelques mois encore, le départ du maire L'Allier pouvait laisser croire que la probabilité de voir cette question soulevée lors de la prochaine assemblée générale de l'organisation, en Espagne, en octobre prochain, était élevée. Parmi les villes membres, actuellement 151, il y a de plus en plus de représentants du Sud qui pensent qu'il faut relocaliser le siège de l'OVPM dans une ville du Sud. Une  tendance qui est générale dans le milieu des organisations internationales, qui font toutes face à la dynamique des enjeux Nord-Sud. Lors de l'assemblée générale précédante d'Évora, en 1997, les maires des villes espagnoles, qui sont particulièrement nombreuses au sein de l'OVPM et qui compte d'ailleurs leur propre Organisation des villes du patrimoine mondial d'Espagne (OVPME),  parlaient fort pour attirer le secrétariat dans leur pays.

"Bien que le maire L'Allier tire sa révérence, le Secrétariat général de l'OVPM reste à Québec et ce ne sera pas un point à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale en octobre. La crise est derrière nous", confirmait en entrevue, fin août, Denis Ricard, le secrétaire général de l'organisme, en poste à Québec depuis deux ans, tout en se devant de signaler que c'est l'Assemblée qui est souveraine. Chose qu'il sait très bien, ayant été lui-même élu par la dite assemblée générale pour un mandat de quatre ans, en 1997!

 

UN SECRÉTARIAT DE PLUS EN PLUS EN BONNE POSTURE

Le fonctionnaire international, qui est un fonctionnaire que le gouvernement du Québec prête à l'OVPM pour la durée de son mandat, croit plutôt que le Secrétariat général est de plus en plus en bonne posture pour demeurer longtemps à Québec.

Pour l'installer ici, les trois paliers de gouvernement au pays avaient fait leur part. La ville avec deux prêts de fonctionnaires, Québec avec une subvention annuelle de 30 000$ et Ottawa avec une subvention annuelle de 100 000$ pour les cinq premières années.

Mais l'année 1998 avait vu cette situation de générosité particulièrement s'assombrir. Lors de l'entrevue, Denis Ricard ne pouvait que rappeler que depuis 1998, il n'y avait donc plus de contribution du gouvernement du Canada pour le Secrétariat de l'OVPM et qu'il n'avait toujours rien reçu du gouvernement du Québec pour 1999, bien que les négociations étaient positives et qu'il croyait être en mesure de compter sur un 30 000$ du Québec, encore une fois.

Très heureux, il confirma par téléphone dès le lendemain qu'il venait tout juste d'apprendre que le gouvernement du Québec venait de lui allouer 40 000$ pour 1999. "Et du côté d'Ottawa, ils sont déjà convaincus de l'importance de ne pas demeurer absent, et nos négociations se poursuivent, pour des sommes, par ailleurs, bien au-delà du 100 000$ comme avant", rappelait aussi Denis Ricard.

Depuis deux ans, la situation financière de l'organisme est devenue beaucoup plus confortable. Le déménagement dans des locaux moins dispendieux, sur la rue Saint-Nicolas, au pied des vieilles Casernes et de l'Hôtel-Dieu de Québec, et d'autres coupures administratives ont enlevé de la pression sur le budget de l'organisme, qui s'élevait à quelque 611 000$ selon les derniers états financiers vérifiés. Mais la meilleure nouvelle, pour le secrétaire général, c'est que les contributions des villes membres, par leurs cotisations, ont énormément augmentées. "Maintenant, plus de 50% de notre budget est assumé par les cotisations des membres, qui varient entre 16 000$ et 600$ par année, pour chaque ville, selon son importance", explique-t-il fièrement. Un progrès énorme avec les premières années de l'organisation.

Il faut dire que Denis Ricard ne ménage plus les mesures incitatrices pour stimuler, voire forcer, les villes à honorer leurs dûs: "Sur notre site Internet, j'ai fait apparaître, en page d'accueil, un Tableau d'honneur des villes en règles de l'OMVP! Un détail, direz-vous, mais qui donne des résultats. On a aussi un système de publicité qui pénalise les mauvais payeurs. Sur l'espace qui les présente, on invite alors les lecteurs du site à visiter les villes en règles. Avec maintenant 27 000 visiteurs par mois sur notre site Internet, voilà encore une mesure qui finit par donner le résultat voulu", ajoute-t-il.

Chaque année, l'OVPM a aussi la chance de voir son membership augmenter grosso modo d'une dizaine de nouvelles villes quasi automatiquement. Ce qui génère encore de nouvelles cotisations. Paradoxalement, elle n'a pourtant aucun contrôle sur le nombre de villes qu'elle peut attirer dans ses rangs. "Ce n'est pas nous qui décidons si une ville fait partie du Patrimoine mondial, c'est un comité de l'UNESCO! Mais aussitôt que de nouvelles villes reçoivent ce privilège, le président de l'OVPM s'empresse d'envoyer une lettre invitant le maire concerné à faire adhérer sa ville à notre organisation", explique Denis Ricard.

 

QUI REMPLACERA LE MAIRE L'ALLIER?

Qui sera le prochain président? Il faudra nécessairement attendre après le congrès et l'Assemblée générale, qui se tiennent à Saint-Jacques-de-Compostelle, en Espagne, du 20 au 23 octobre prochain, pour le savoir. C'est le conseil d'administration qui décide! Une fois ses huit membres élus par l'Assemblée générale, les huit maires en question se réunissent entre-eux pour déterminer qui sera le Président, pour quatre ans. De sorte que même si le maire L'Allier terminera son présent mandat à la ville de Québec dans deux ans, il aurait très bien pu se représenter à la présidence de l'OVPM et donner en cadeau à son successeur les deux dernières années du mandat en question, car ce sont bien les maires des villes qui sont élus et non pas les individus. Mais il semble que le maire L'Allier en a décidé autrement! On dit que deux candidats déjà connus dans le milieu ne demandent pas mieux que de prendre la relève, mais tous ces maires des villes membres sont aussi des politiciens, et qui dit politicien, dit souvent surprise! Alors réponse fin octobre 1999.

D'ailleurs, l'OVPM ne fera pas parler d'elle que pour son nouveau président, d'ici l'an 2000. "Nous avons mis en place un Projet pour l'an 2000 exceptionnel: "VILLE de CULTURE pour la PAIX", un concours international d'écriture et de dessin auprès de la jeunesse entre 13 et 15 ans, appuyé par une trousse pédagogique sur le patrimoine à l'intention des professeurs d'histoire et de géographie ou de sciences humaines, qui culminera d'abord jusqu'au 8 septembre, Journée de solidarité des villes du patrimoine mondial, et finalement jusqu'en décembre, à l'occasion de la 24e Session du Comité du patrimoine mondial de l'UNESCO, qui se tiendra à Budapest et qui choisira deux grands gagnants, qui mériteront d'ailleurs une bourse d'une compagnie prestigieuse de Montréal", conclut le secrétaire général.