Le maire L'Allier sera à Cuba du 14 au 16 novembre 1999
Québec et La Havane s'échangent des statues de D'Iberville et de Marti

par Daniel Allard

(EXCLUSIF)  Pour faire suite à la nouvelle qu'annonçait en exclusivité COMMERCE MONDE en juillet dernier, c'est maintenant confirmé, le maire de Québec, Jean-Paul L'Allier, se rendra à Cuba en novembre prochain. Avant d'honorer une autre invitation qui le conduira ensuite à Miami du 17 au 19, il séjournera à La Havane, du 14 au 16 novembre prochain.

À titre de président de l'Organisation des villes du patrimoine mondial (OVPM), monsieur L'Allier est invité à la7e Rencontre pour la coopération et la solidarité des mairies ibéro-américaines. Cet événement se déroulera à Cuba, les 18-19 et 20 novembre, dans la foulée des manifestations marquant le 480e anniversaire de fondation de la capitale, La Havane.

UN MARTI CONTRE UN D'IBERVILLE

Toujours selon les informations recueillies par COMMERCE MONDE, les fêtes du 480e de La Havane seront également une occasion pour le maire de la capitale du Québec d'offrir à la capitale cubaine un buste de l'explorateur Pierre Le Moyne D'Iberville, héros de l'histoire de la Nouvelle-France, par ailleurs mort à La Havane, en 1706. Un monument D'Iberville sera installé devant la forteresse de la Punta, un endroit prestigieux du Vieux-Port de La Havane. La cérémonie d'inauguration, prévue le 14 novembre, est une autre activité officielle à laquelle le maire L'Allier devrait participer, cette fois au nom du Gouvernement du Québec qui ne prévoit plus avoir un représentant officiel sur place, suite aux événements des Jeux pan-américains de Winnipeg.

Ce cadeau du Québec ne sera pas à sens unique: "Un buste de José Marti est déjà en route pour Québec et un buste de Pierre Le Moyne D'Iberville sera effectivement dévoilé par le maire L'Allier, en novembre, lors de son passage à Cuba", expliquait, fin août, Renée-Claude Boivin, la responsable des communications au cabinet du maire, à Québec.

En partie pour souligner le fait historique qui a vu mourir D'Iberville à La Havane en juillet 1706 - alors qu'il entamait une expédition d'invasion des colonies anglaises - ce geste du maire L'Allier pourrait aussi être interprété comme une importante manifestation de rapprochement, dans un climat international qui ne rallie pas tous les premiers venus aux autorités de l'île que gouverne Fidel Castro.

En entrevue téléphonique, le 14 septembre dernier, le premier citoyen de la Ville de Québec a expliqué qu'il ne voyait pas cela du même oeil: "...Je ne vais pas là pour courtiser Cuba. Ce n'est pas le rôle d'une ville... Il s'agit d'aller souligner le 480e anniversaire d'une ville. C'est un geste de politesse. On ne va pas là pour faire de la politique", a-t-il simplement répondu, souhaitant continuer de développer des relations d'amitié cordiales avec une autre des plus vieilles villes d'Amérique! "...Et si le Gouvernement du Québec me confirme sa volonté de le représenter pour inaugurer le D'Iberville, je le ferai volontier", a aussi précisé Jean-Paul L'Allier. Précisons que c'est officiellement la CCNQ qui offre le D'Iberville à La Havane et que l'option que son pdg, Pierre Boucher, soit présent à la cérémonie d'inauguration en novembre n'est pas encore écartée non plus.

Le maire a par ailleurs confirmé qu'il n'y aurait pas de volet économique à ce voyage: "On ne peut pas tout faire en même temps et là il s'agit d'une visite dans le cadre du 480e anniversaire de La Havanne". D'ailleurs, le projet du maire est de n'être accompagné que d'un Conseiller municipal habile avec la langue espagnole, pour que ce dernier participe ensuite à la 7e Rencontre des maires ibéro-américains en question, du 18 au 20 novembre, alors que lui devra repartir sur Miami pour un autre engagement.

DEUX VIEUX PROJETS PLUTÔT QU'UN SE CONCRÉTISENT

Dans le livre du maire, il n'est cependant pas question d'inauguration, dans le vieux port de La Havane, de la "Plaza de Québec" dont COMMERCE MONDE faisait mention en juillet dernier. Un projet qui ne date pas d'hier et donc le maire confirme d'ailleurs l'existence.

L'historiador de la ciudad de La Havane, Euzebio Leal Spengler, qui admire beaucoup le maire L'Allier, avait déjà promis que si ce dernier venait en personne pour l'inaugurer, il rénoverait - pour en faire une "maison culturelle en l'honneur du Québec" - une maison historique du Vieux-Havane. Le comédien Albert Millaire, qui a justement personnifié D'Iberville dans la fameuse série télévisée, a même fait un voyage à Cuba relié à cela, il y a quelques années déjà. Mais l'échange de monuments n'a rien à voir avec ça! Léonce Bouchard, conseiller responsable du pupitre Cuba au ministère des Relations internationales, à Québec, explique que ce projet fait partie du plan de restauration mis sur pied depuis longtemps par cet organisme - qui est un peu le pendant de la CCNQ - et qui consistait à "donner" ainsi des maisons dans le but de les voir restaurer. "Je sais que cet autre projet est aussi sur le point d'arriver à terme. Effectivement, l'équipe de monsieur Spengler s'affère à restaurer une "Maison du Québec", mais tout à fait à son initiative et à ses frais. Le Gouvernement du Québec n'y est aucunement associé", précise-t-il. De son côté, le maire L'Allier dit ne pas avoir entendu parler récemment de cette initiative et qu'aucune invitation d'inauguration n'est dans l'air à ce propos présentement.

L'origine de l'échange de monuments vient plutôt d'un voyage effectué il y a quatre ans: "Les Cubains avaient demandé au ministre Marcel Landry une réplique du D'Iberville de la façade du Parlement. Comme à Québec nous avons un parc dédié à l'Amérique latine, où chaque pays du continent est d'ailleurs invité à installer un monument, il a été convenu avec la CCNQ que Cuba donnerait aussi un buste, en l'occurence un José Marti", explique encore Léonce Bouchard.

OÙ IRA LE JOSÉ MARTI?

Pour les autorités de la Ville de Québec et de la Commission de la capitale nationale du Québec (CCNQ), l'arrivée d'un buste de José Marti aurait pu amplifier un problème de gestion de l'espace, en matière de monuments officiels dans la capitale. Le José Marti, qui attend déjà dans l'Ambassade de Cuba à Ottawa, s'ajoutera par exemple au monument marquant les relations entre le Québec et l'Acadie, que l'Association des Acadiens de Québec a projet de faire ériger, quelque part, l'été prochain!

Denis Angers, porte-parole de la CCNQ, a déjà expliqué que dans le plan d'action de la commission, le Parc de l'Amérique française, en face du Grand Théâtre de Québec, est une propriété du gouvernement du Québec réservée pour des monuments à vocations restreintes, soit des oeuvres honorant des hommes et des femmes de culture. José Marti est un écrivain héros de l'indépendance hispano-américaine! Son arrivée à Québec générera-t-elle une autre polémique à la "Charles de Gaules"? L'histoire le dira, la date de son arrivée à Québec est encore inconnue. Mais le lieu de son installation ne pourra pas faire l'objet de débat. C'est bien dans le Parc de l'Amérique latine, juste au nord du Palais de Justice de Québec, que le Jose Marti ira, accompagner le monument de Simon Bolivar toujours solitaire, confirme à nouveau Léonce Bouchard.

José Marti est un écrivain et un patriote cubain, né à La Havane en 1853 et mort - à 42 ans - en 1895. Bien qu'il soit un héros de l'indépendance hispano-américaine, il a passé une grande partie de sa vie à Paris et ailleurs en Europe.