Investissement vs. droits humains
«Nous défendons une position très pro investissements», affirme Jean-Louis Roy
2006-05-18

Par Daniel Allard

De passage à Québec le 16 mai dernier, le président de Droits et Démocratie, Jean-Louis Roy, a accepté de faire le point avec nous concernant la cause qu’il défend en priorité depuis maintenant quatre ans. De tels organismes, qui se consacrent à la promotion et à la défense des droits humains, sont encore rares à travers le monde. Pourtant, il reste tant à faire...

Outre la Canada, il faut souligner l'exemple de l’Institut danois des droits de la personne (Danish Institute  for Human Rights) : « Il a été créé un an après nous (...) On y fait là-bas une chose que nous ne faisons pas encore vraiment, soit d'offrir des services directement aux industriels. Ils ont une sorte de check list qui permet aux industriels danois d’évaluer directement leur projet. Ils font aussi beaucoup de contrats à la demande même des entreprises ».

Droits et Démocratie, c’est le Centre international des droits de la personne et du développement démocratique, un organisme non partisan investi d'un mandat international créé en 1988 par le Parlement du Canada pour encourager et appuyer les valeurs universelles des droits humains et promouvoir les institutions et pratiques démocratiques partout dans le monde. Il reste encore quasiment sans équivalent dans le monde. Son siège social est situé à Montréal et Jean-Louis Roy, qui gère sa trentaine d’employés et son budget dépassant depuis l’an dernier les 10 millions $, en est le président depuis 2002. Ed Broadbent (1989-1996) et Warren Allmand (1997-2002) l’avaient précédé.

Jean-Louis Roy pouvait d'autant en parler qu'il revenait tout juste d'un séjour à Copenhague, où il a signé une entente de coopération avec le DIHR. « Par cette entente, nos deux organismes ont décidé d'agir ensemble en Asie, certainement en Chine et au Vietnam », a-t-il résumé.

Il existe aussi un autre institut du genre, aux Pays-Bas, mais celui-ci traverserait semble-t-il des moments difficiles. La récente offre de rencontre de M. Roy est restée sans résultat. Bref, il y a surtout le Canada, le Danemark et quelques autres pays qui sont particulièrement pro actifs en matière de défense internationale des droits de la personne et du développement démocratique. Alors comment voit-il les choses, aujourd’hui, après quatre années de labeurs accomplies ?

« Après la catastrophe de Bhopal, qui fut un choc ; avec le fait que maintenant il existe de plus en plus de groupes d'actions partout dans le monde ; et troisièmement, avec le fait que de plus en plus de fonds d’investissement exigent des garanties et des vérifications avant d’investir (investissement éthique), tout ça a mené à beaucoup d'initiatives en matière de respect des droits humains dans les dernières années (...) Mais bien qu’ils s’agissent de progrès importants, il faut constater que tout cela demeure sur des bases volontaires.

La prochaine étape, ce sera de se poser la question s'il faut faire en sorte que ça reste sous le mode volontaire, ou s'il faut des règles contraignantes qui obligent nos entreprises à respecter les droits humains », affirme avec détermination J-L Roy.

DU NOUVEAU À L’ONU
Un important élément au débat vient d’être ajouté récemment sur la scène internationale, via un comité des Nations unies que préside d’ailleurs une canadienne : « La réponse du comité que préside Madame Louise Arbour propose de faire en sorte que tout se fasse au niveau national et que se soient les pays qui fassent respecter le tout », nous rapporte-t-il.

Cette démarche dont parle ici Jean-Louis Roy découle effectivement de la nomination, en 2005, par le Conseil économique et social de l’ONU (prenant note de la résolution 2005/69 de la Commission des droits de l’homme) d’un Représentant spécial pour la question des droits de l’homme, des sociétés transnationales et autres entreprises avec mandat de deux ans.

« Nous, notre position, à Droits et Démocratie, est la suivante : si, au Canada, nous pouvions obtenir que chaque fois qu'il y a des subventions, des ressources publiques, des facilités fiscales, bref que de l’argent public est en cause, une compagnie soit obligée de tenir une étude d'impact sur les droits humains avant de réaliser son projet, nous ferions un grand pas. »

« (...)Le gouvernement Martin s'était dit d'accord avec ce principe. Il avait prévu une série de consultations publiques auprès des Canadiens (...) Tout ce que je sais, c’est que le nouveau gouvernement conservateur a maintenu cette position », explique-t-il sur un mode optimiste.

En clair, il ne demande pas plus que de faire pour les droits humains ce que nos sociétés acceptent maintenant de faire pour le domaine de l’environnement (avec des études d’impact environnemental intégrées dans l’évaluation normale de tout projet) !

« (...)c'est une position très pro investissement
(...) Le véritable drame des pays en développement,
c'est de ne pas recevoir suffisamment
d'investissements étrangers »

« Je considère que c'est une position très pro investissement que nous avons. Le véritable drame des pays en développement, c'est de ne pas recevoir suffisamment d'investissements étrangers. Notre initiative, c'est une bataille pour que l'investissement étranger n'apparaisse pas comme un obstacle au développement", plaide en conclusion cet homme de conviction. Et d’ici fin 2007, il pourra aussi plaider qu’il a maintenant un outil concret pour assumer cette avancée en faveur des droits humains (voir notre autre article dans notre #50: www.commercemonde.com/commercemonde.php?niveau=2&id=190 ).

Enfin, quoi qu’il arrive, Droits et Démocratie est loin de se retrouver sans ressource. C'est à la suite d'une résolution unanime du Parlement fédéral canadien que son financement de l’État pour l’année dernière a été porté de 4,8 à 8,3 millions $. « Et nous allons chercher un autre 3 M$ de divers autres partenaires. Et maintenant, on commence aussi à nous tourner vers les fondations privées », nous a expliqué un président visiblement à son affaire.

Mais qui comme plusieurs avait probablement constaté, encore sous un sombre aspect, toute l’ampleur de la tâche qu’il reste à accomplir en voyant les journaux relater récemment un rapport du Bureau international du travail (BIT) publié il y a déjà un an et qui a estimé à au moins 12,3 millions le nombre de personnes victimes de « travail forcé » dans le monde. Des « esclaves modernes » qui rapportent quelque chose comme 32 milliards de $US par année à ceux qui les exploitent. Le fléau des « esclaves modernes » concernerait surtout l'Asie, avec près de 10 millions de travailleurs forcés, mais aussi l’Amérique latine, l’Afrique et le Moyen-Orient... Le rapport du BIT soutient qu’on en trouve même plus de 350 000 dans les pays industrialisés. Pour la moitié, ils ont moins de 18 ans...

Alors ne demandez pas pourquoi il faut s'occuper encore autant des droits humains dans les années 2000 !

Jean-Louis Roy était de passage à Québec le 16 mai, à titre de conférencier au III Congrès mondial des infirmières et infirmiers francophones. Il y a présenté une réflexion sous le thème : « La santé comme droits humains ».

« L’idée des droits humains, la politique visant leur promotion et protection constituent des éléments neufs dans l’histoire de l’humanité. Il y a quelques décennies à peine, on ne trouvait aucune trace de cette idée dans le droit international et dans les droits nationaux… aucune trace. Elle y est incorporée aujourd’hui comme une composante majeure à la fois au niveau global et au plan national dans la quasi-totalité des pays du monde (...)

Énoncé pour la première fois dans la constitution de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), «le droit à la santé» est réaffirmé dans chacun de ces textes fondateurs. Ces derniers consacrent des normes fixant les obligations des états qui les ratifient, et notamment, l’obligation «de mettre en place des politiques et des plans d’action permettant à tous d’accéder le plus rapidement possible à des soins de santé» (...)

Dans le cas du droit à la santé, je rappelle les composantes essentielles : disponibilité, accessibilité pour tous, acceptabilité et qualité (...) », a-t-il entre autres exposé.

Insistant sur le fait que les « pays les plus riches dont le nôtre, ont l’obligation d’aider les plus fragiles... », il a choisi d’évoquer deux domaines actuels de la négociation internationale affectant les droits humains, et plus spécialement, le droit à la santé :

-
L’accès aux médicaments ;
-
La responsabilité des entreprises transnationales.


Human Rights Library
http://hei.unige.ch/humanrts/links/alphalinks.html 

Le portail des droits de l’Homme
http://www.idhbb.org


Danish Institute  for Human Rights
http://www.humanrights.dk

International Centre for Human Rights and Democratic Development
(Droits et Démocratie)
http://www.ichrdd.ca

Fait à Québec le 19 mai 2006.


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