ANALYSE: Financement de la commercialisation
Québec, Canada : terre d'accueil pour les adeptes de la R&D (2e de 3)
2009-06-12


Par Ronald Bannon Expert en commercialisation

Dans cette analyse, j'aimerais aborder avec vous un sujet d'actualité, le financement de la commercialisation et particulièrement celui associé au développement des marchés internationaux. Sans vouloir être réducteur dans l'approche, je souhaite toucher l'ensemble des principaux éléments qui font partie de cette incontournable fonction nécessaire pour assurer le développement et la croissance de l'entreprise. En effet, l'accès au marché et la vente de produits et de services constituent l'aboutissement ultime de toute démarche d'entreprise. La forme de la vente ou du service peut varier d'une entreprise à une autre, selon le modèle d'affaires privilégié. Pour de nombreuses PME du Québec, la capacité de mettre en marché des produits et/ou des services issus de la R&D est parfois un chemin long et ardu.

***

Dans la première partie, publiée en 2008, j'ai fait état des crédits d'impôts à la recherche scientifique et au développement expérimental (RS & DE) et à d'autres crédits fiscaux qui rendent les entreprises innovantes du Québec dépendantes de ces leviers économiques et qui, faute d'autres ressources et de moyens additionnels, constituent un frein à la commercialisation. Évidemment, une des propositions avancées pour solutionner ce problème criant serait de permettre, à certaines conditions, de pouvoir transformer les crédits à la RS & DE en crédits d'impôts à la commercialisation. Une de ces conditions pourrait être d'utiliser - en tout ou en partie - ces crédits sur une période de trois à cinq ans pour permettre l'introduction, sur des marchés ciblés, d'une nouvelle technologie en provenance du Canada.

À défaut d'obtenir une telle contribution, une des suggestions simples et efficaces pour accélérer la visibilité d'une entreprise, consistait à élaborer une preuve de concept et la présenter à des industriels au moyen de papiers techniques appuyée, entre autres, par des recherches validées au moyen d'un groupe d'experts indépendants. Cette approche commerciale a permis d'obtenir rapidement des rendez-vous avec des clients dits validateurs pour l'introduction d'une nouvelle technologie en génie industriel. Des ventes internationales ont découlées de cette présentation et de cette méthode de vente.

Nombreuses sont les jeunes entreprises qui aspirent à devenir des leaders avec des innovations développées au Québec et ce n'est pas les opportunités ni le talent qui manquent. Sauf dans le cas de rares exceptions, peu de PME du Québec ont toutefois les moyens de pouvoir proposer des technologies innovantes, faute également de connaissances tangibles des marchés internationaux.

Le manque de connaissances internationales est un facteur réducteur qui amène les entreprises de chez nous à se limiter géographiquement au territoire du Québec et du Canada. Nombreuses d'entre elles peuvent, avec un accès web illimité, communiquer avec d'autres sociétés, sans limitation, pour offrir des solutions développées au Québec et au Canada. La sollicitation par le web constitue un puissant outil de vente que j'encourage toute entreprise à utiliser pour se faire connaître ou encore pour se démarquer.

Le marché domestique étant plutôt restreint et offrant peu de possibilité de croissance à long terme, il faut chercher à développer de nouveaux marchés là où l'on peut soutenir la croissance de l'entreprise, par l'identification de nouvelles opportunités d'affaires à l'international. Pour le marché des États-Unis, qui constitue le principal partenaire économique du Canada, il faut trouver des moyens ingénieux pour continuer à y faire des affaires. Pour éviter de tomber sous le coup du « Buy America Act » et être victime d'un éventuel embargo commercial, il serait préférable, voire essentiel, de considérer l'incorporation d'une filiale aux USA (une société à responsabilité limitée du Delaware, par exemple - veuillez consulter votre conseiller légal pour une meilleure compréhension des risques). Ceux qui ont davantage de moyens financiers devraient considérer l'acquisition d'une société américaine pour s'assurer une place de choix sur le marché de nos voisins du Sud. Détail intéressant: la Banque TD a prédit que le dollar canadien serait au pair avec le dollar américain d'ici à la fin de l'année 2009.

Pour plus de cibles géographiques, je vous recommande de consulter la liste des traités de libre-échange que le Canada a signés avec des pays autres que les États-Unis. Sur le site web du Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada (MAECI), on peut y lire que le Canada a signé des accords de libre-échange avec entre autres : le Mexique, la Colombie, le Pérou, le Costa Rica, le Chili et Israël. Au 1er juillet 2009, entrera en vigueur un accord commercial avec des pays membres de l'Association européenne de libre-échange (AELE) et qui visera plus particulièrement les pays suivants : l'Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse. Vous y remarquerez aussi que le Canada négocie depuis plusieurs années des traités commerciaux avec d'autres pays et dont les résultats seront annoncés dès le dénouement des négociations. (Pour plus d'informations sur les traités de libre-échange entre le Canada et les pays mentionnés précédemment: http://www.international.gc.ca/trade-agreements-accords-commerciaux/agr-acc/index.aspx?lang=fra.)

Ce site web demeure, à mon avis, un lien à ajouter à vos pages web favorites.

Pour en connaître plus sur les marchés étrangers, je vous invite à vous renseigner en visitant régulièrement le site du MAECI, dans la section commerce international, où vous trouverez à gauche un onglet intitulé « Faire des affaires à l'étranger ». Sur cette page, il y a un onglet qui s'intitule « Services aux voyageurs ». Pour chacun des pays avec lequel le Canada entretient des relations diplomatiques et commerciales, vous pourrez y consulter des informations précieuses sur les us et coutumes des pays qui vous intéressent et sur les risques politiques et économiques qui y prévalent au moment présent. Voici l'adresse de la page web: http://www.voyage.gc.ca/index-fra.asp. Si vous souhaitez en savoir plus sur ce sujet, il y aussi le Ministère français des affaires étrangères à visiter, qui informe ses citoyens sur les conditions qui règnent dans les pays qui font l'objet de votre intérêt commercial: http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/conseils-aux-voyageurs_909/index.html.

L'année 2008-09 a été, pour ma part, riche en mandats de toute sorte, que ce soit en coaching ou en support à la commercialisation d'innovations. Je constate qu'il est difficile de combler les besoins actuels des entreprises innovantes du Québec en matière de développement des affaires et de financement à la commercialisation. Le transfert de connaissances s'avère un puissant outil pour former les entrepreneurs. C'est pourquoi, mon associée Johanne Asselin et moi, avons développé deux cours - dont un cours en commercialisation - dans le cadre d'un programme de valorisation des technologies que nous donnions depuis 2003 pour le compte du Réseau InterVal (http://www.interval-technologies.ca/index1_fr.html), de concert avec l'Université de Sherbrooke. Ce cours est principalement destiné aux futurs employés des BLEU dans les universités (Bureau de Liaison Entreprise-Université).

L'autre cours est un pilote sur la commercialisation des innovations technologiques que nous avons livré pour la première fois cet hiver, à Longueuil, avec le concours et l'assistance de Développement économique Longueuil (Lisette Corbeil, Vice-présidente - Soutien aux entreprises, et Geneviève Bourgoing, Directrice, Innovation et technologies - Soutien aux entreprises). Ce cours a été offert à huit entreprises innovantes de la grande région de Longueuil œuvrant toutes dans des secteurs différents d'activités économiques.

Sans pour autant vouloir généraliser, nos constats sur les lacunes commerciales des PME du Québec sont sensiblement toujours les mêmes. Quoique sensibilisées à l'importance de commercialiser et aussi touchées par le manque de financement à la commercialisation et de connaissances des marchés étrangers, les entreprises sont confrontées, à différent degré, aux problèmes suivants :

  1. Manque de stratégie à long terme (vision);
  2. Manque de connaissances des barrières à l'entrée (normes et standards);
  3. Difficulté à identifier la longueur du cycle de vente (temps requis pour réaliser une première vente selon les marchés ciblés);
  4. Manque de protection en matière de propriété intellectuelle (marque de commerce, brevet, dessin industriel, droits d'auteurs).

Ces problèmes sont parfois des obstacles pour obtenir du financement et pour confirmer une première vente. Analysons chacune de ces observations et tentons d'en tirer des éléments de réflexion.

LA VISION
La première, la vision, est l'élément qui lie l'ensemble des forces et des ressources d'une organisation et qui permet d'entrevoir le futur avec un certain niveau de réalisme et d'optimisme. C'est par la vision qu'il est possible de développer la stratégie à long terme pour orienter les choix, les décisions et les actions. Des bailleurs de fonds vont considérer ce critère avec beaucoup d'importance, puisque la vision permet de sécuriser et de centraliser tous les individus qui participent de près ou de loin au développement de l'entreprise autour d'une même cause.

C'est l'effet rassembleur qui unit les gens à long terme. Non pas les opportunités, qui créent un effet à court terme seulement.

LES BARRIÈRES À L'ENTRÉE
La seconde est la difficulté à bien identifier les barrières à l'entrée qui sont souvent connues sous la forme de normes ou de standards. Ces barrières sont bien réelles dans des marchés où les marches à gravir sont hautes pour y réussir. Ces normes peuvent être soient liées à des règlementations ou à des obligations de qualité qu'il faut respecter pour entrer dans un marché donné.

L'erreur la plus courante que je constate dans ma pratique est le fait de voir des entreprises cibler des normes locales qui sont faciles à atteindre alors que celles-ci ne permettront pas d'entrer dans des marchés d'envergure où les règles sont plus strictes parce qu'elles répondent à un ensemble de standards internationaux (ex. ISO).

BIEN IDENTIFIER LE CYCLE DE VENTE
La troisième observation est la difficulté à bien identifier le cycle de vente en présence de différents types d'acheteurs. En effet, ce cycle varie selon le type de client que l'on cible. Souvent, j'entends que des clients veulent percer des marchés institutionnels (ministères, agences gouvernementales, marché militaire, réseau de la santé, etc.). Ces marchés fonctionnent avec des règles basées sur des pratiques d'affaires et des procédures qui sont longues à mettre en place pour assurer, entre autres, la sécurité du public. Il sera donc plus difficile à obtenir des ventes de ce type d'acheteur à cause d'un mécanisme de qualification, de la longueur du processus décisionnel et des budgets disponibles.

À moins d'avoir une solution à un problème précis, dans un temps donné et ce, à un coût accessible, ça pourrait possiblement réussir. Sinon, il est préférable de s'attaquer à des marchés qui donneront des résultats à plus court terme, comme celui des entreprises privées, ou le « B to B » si vous préférez.

PROTECTION DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE
La dernière observation, est le manque de protection par la propriété intellectuelle. Trop d'entreprises négligent cet aspect, alors qu'il s'agit probablement du dernier maillon qui nous sépare encore des pays en forte progression comme la Chine, la Russie, le Brésil et l'Inde. Tant que nous investissons dans la protection de nos idées, nous maintenons une longueur d'avance sur la concurrence farouche que nous livrent ces pays et d'autres. Plusieurs me disent qu'il faut avoir les moyens de poursuivre lorsque l'on a des brevets. C'est juste. Mais la vraie question qu'il faut se poser c'est plutôt: Pouvons-nous accepter de perdre des parts de marché sans réagir ou sans se démarquer, alors que l'effet le plus souvent constaté est une baisse généralisée des prix? Face à un tel contexte, il faut donner du contenu et des avantages concurrentiels à notre offre de produits ou de services.

Un des cas intéressants, dans lequel j'ai été professionnellement impliqué au niveau de la commercialisation internationale en 2008 via la Technopole de la Vallée du Saint-Maurice (MM Cédric Durban et Charles Lambert), est l'introduction d'un nouveau procédé d'embouvetage pour l'industrie du plancher de bois franc appelé le TEMAVIMC (Tenon Et Mortaise Adaptés au Vernissage et à l'Installation). Cette innovation a été développée par Monsieur Pierre Trudel de la Société René St-Cyr (http://www.rene-st-cyr.com/) située à Notre-Dame-du-Mont-Carmel. La présidente, Madame Guylaine St-Cyr, a mis en place une stratégie de propriété intellectuelle qui lui permet de se positionner de telle sorte qu'il sera assez difficile pour ses concurrents de pouvoir contourner ses brevets, sans risquer de les copier. Aujourd'hui, elle occupe une place de choix dans son industrie, puisque la Société René St-Cyr est la seule entreprise au Québec à offrir un profilé breveté fait de bois naturel. Elle est, de plus, une des rares entreprises au Québec dans la deuxième transformation du bois franc, dont les ventes sont en hausse et dont la production est assurée pour plusieurs mois.

Ronald Bannon est Associé senior et expert-conseil en stratégie et commercialisation internationale d'innovations technologiques et scientifiques de la firme Asselin Bannon Conseils en Management stratégique, division de la Société de gestion et de formation GEXIMTM Inc. Pour tout commentaire en rapport avec la présente chronique, vous êtes invité à communiquer avec lui à l'adresse suivante : RBannon1@videotron.ca

Fait à Québec le 11 juin 2009.


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