Chronique "TI" : La réalité du Web francophone au Québec
Québécoises pure laine? Big Knowledge, Finder Expert, Interfacing, Openface Internet, ZeroSpam, Wanted Technologies?
2005-10-18


Par Jacques Pigeon
Chroniqueur
jpigeon@elara.ca

Je suis assis à la terrasse d'un café sur la rue Ontario Est en compagnie de deux jeunes spécialistes de la stratégie Internet. Jean-François Renaud et Simon Lamarche dirigent ADVISO conseil, un jeune cabinet de spécialistes du domaine.

La bière est bonne. Guinness pour Simon et moi, Boréale pour Jean-François. La conversation, encore plus enivrante. Notre discussion, centrée autour de l'utilisation du Web au Québec nous conduit à quatre constats :

  • Le Web coûte plus cher aux entreprises québécoises.
  • Bon nombre de nouveaux logiciels, en gestion de contenus (CMS) par exemple, ne sont disponibles qu'en anglais.
  • Le déficit en contenus québécois francophones s'accroît.
  • Nos institutions chargées de la protection de la langue française ne comprennent pas la dynamique du Web.

Avant de les passer en revue, quelques mots sur l'objet de la dissertation.

Le commerce électronique est un terme englobant qui inclut non seulement des activités transactionnelles mais aussi, et certains diraient surtout, des activités de marketing. Le volume de transactions sur le Web ne cesse d'augmenter. Dans certains secteurs d'activités, comme celui des banques. C'est devenu routine : près de la moitié des canadiens possédant un compte bancaire font des transactions en ligne. Ils font des virements, ils paient leurs comptes et ne fréquentent que très rarement les succursales.

Mais c'est dans le secteur du marketing, surtout entre entreprises, que l'utilisation du commerce électronique est la plus importante. L'exemple de l'automobile l'illustre bien. Il y a quelques années, on croyait vendre des automobiles directement via l'Internet. C'était bien naïf. Mais qui aurait cru qu'aujourd'hui, la plupart des acheteurs qui se présentent dans une salle d'exposition ont déjà fait leur choix après avoir consulté l'Internet ? Le Web, pour qui sait s'en servir, donne un pouvoir considérable à l'acheteur. Si vous avez investi quelques dollars (environ 40) chez www.carcostcanada.com vous savez exactement quel prix le concessionnaire a payé pour le véhicule qui vous intéresse. Comme vous connaissez maintenant sa marge de profit et tous les programmes de rabais de la compagnie, votre pouvoir de négociation est décuplé; c'est maintenant vous qui tenez le gros bout du bâton.

Cet exemple met aussi en évidence les limites du Web francophone. Que je sache, cette information n'est disponible sur aucun site francophone…

La brève analyse qui suit est mon interprétation personnelle des informations que j'ai recueillies en sirotant ma bière avec les experts d'Adviso. Je suis le seul responsable des propos qui suivent.

OUI ÇA COÛTE PLUS CHER
Toute entreprise québécoise le moindrement ambitieuse produit un site dans les deux langues. Ce n'est pas seulement affaire de traduction. Les coûts additionnels proviennent surtout de l'effet de complexité qui accompagne un site bilingue. Le volume de contenus est plus que doublé, la navigation plus complexe et la gestion des contenus plus problématique.

Et pour une entreprise québécoise en TI, il est souvent plus pratique de construire le site d'abord en anglais. Marché oblige!

Plus encore, les entreprises de techno d'ici évoluent toujours sur un marché qui est au moins nord-américain. Elles recherchent donc activement les avis et conseils des grandes sociétés d'analystes de marché comme les Forester, Gartner, IDC, pour ne nommer que celles-là. Et dans quelle langue communique-t-on avec ces gens là?

D'ailleurs, pour se donner une image américaine, plusieurs entreprises dirigées par des francophones choisissent des noms anglais: Big Knowledge, Wanted Technologies, ZeroSpam, Finder Expert, HumanWare, Interfacing Technologies, OpenFace Internet…alouette!

LOGICIELS: S’IL FALLAIT ATTENDRE LA VERSION FRANÇAISE …
L'industrie du logiciel – c'est bien connu – est d'abord américaine. Il m'arrive de demander à des amis de me donner le nom d'un logiciel qui ne soit pas américain. Plus souvent qu'autrement, mes interlocuteurs demeurent muets. Des innovations récentes comme la technologie RSS (Real Simple Syndication) qui permettent l'importation sans douleur de multiples contenus sont tellement américains que les spécialistes d'ici auraient de la difficulté à s'en servir en français. Qu'on le veuille ou pas, l'innovation en technologie parcourt un long chemin avant de nous rejoindre en français.

UN GROS DÉFICIT DE CONTENUS
Çà c'est plus grave et c'est d'ailleurs là que devraient se concentrer nos efforts collectifs. Le Québec francophone occupe une bien petite place sur le Web, mais il se confond trop souvent avec les contenus français. Cependant, les grands moteurs de recherche font la différence.

Ce déficit est d'autant plus triste que Montréal est l'une des grandes capitales du multimédia. Heureusement, il y a de belles exceptions. J'en nommerai deux: La Fédération des Caisses Populaires Desjardins et Hydro Québec. Les caisses ont toujours été à l'avant garde en matière d'adoption des technologies de l'information. La qualité des services en ligne y est de classe mondiale et le très haut degré d'utilisation de ces services par ses membres – autour de 50% si l'on m'a bien renseigné – en est la preuve.

Sur le site d'Hydro Québec, vous pouvez visualiser sur un graphique votre niveau de consommation en comparaison avec celui de l'année précédente. Information des plus utiles pour aider les individus à gérer leur consommation.

Ce que ces deux entreprises ont en commun est qu'elles disposent de ressources considérables; ce qui n'est pas le cas de la majorité des entreprises québécoises dont un grand nombre n'on même pas de site Web.

NOS ORGANISMES RÈGLEMENTAIRES
La réalité décrite plus haut semble échapper à nos organismes réglementaires comme à bon nombre de politiciens qui semblent préférer l'approche défensive à l'approche offensive. L'approche défensive est centrée sur la protection, sur l'érection de remparts par rapport à l'approche offensive qui se construit sur l'excellence. Comme SNC-Lavalin ou le Cirque du Soleil.

Tous ceux qui doivent veiller, de près ou de loin, à l'application de la Charte devraient obligatoirement faire une séjour d'une semaine dans une société de logiciels québécoise pour voir ce qui se passe vraiment dans la vie de tous les jours, à quels défis elles doivent faire face, comment la bonne maîtrise de l'anglais est devenue une clé de succès.

LA MORALE DE CETTE MORALE … (Chanson à boire)
La prospérité du Québec est directement reliée à la capacité de ses citoyens à maîtriser l'anglais. Une langue qu'il faut apprendre très tôt dans la vie pour s'exprimer en tout confort. La mondialisation nous y condamne. Une entreprise de TI qui se limite au Québec refuse de croitre, de créer cette richesse dont nous avons tant besoin. Certains prétendent que la qualité du français en souffrira. C'est plutôt le contraire qui se produit; généralement, plus l'individu est bilingue, meilleur est son français!

Peut-on imaginer un meilleur exemple que René Lévesque?

Écrivez-moi à jpigeon@elara.ca

Fait à Montréal le 14 octobre 2005.


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