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À très exactement 12 mois du Brexit… que penser ?

La commotion du résultat du référendum du 23 juin 2016 au Royaume-Uni confirmant le processus de sortie de ce pays de l’Union européenne (baptisé « Brexit ») laissa ensuite flotter des mois de questionnement, voire de requestionnement. Mais lorsque le 29 mars 2017 la lettre de notification au président du Conseil européen lui fut parvenue, il n’y avait plus de doute : l’application de l’article 50 du traité de l’Union se confirmait. S’ouvrit alors la période statutaire de deux ans pour conclure les négociations de sortie. Avec mars 2018, qui se termine demain, nous sommes donc très exactement à mi parcours dudit deux ans. Ce sont donc les douze mois à partir d’actuellement qui détermineront l’avenir de l’économie du Royaume-Uni (R-U). Et peut-être aussi de l’Union européenne (UE)! Voyons-voir…

Première grande question : y aura-t-il aussi un nouvel accord d’association… associé à la sortie officielle du R-U de l’UE? Ce triller, qui se joue parallèlement, a son propre cadre d’opération. Car s’il y a le « Comment sortir le R-U de l’UE? », se pose aussi la question de comment organiser ensuite la relation commerciale entre les deux parties…

Car au-delà de techniquement réussir « le détricotage des relations complexes liées à l’appartenance à l’Union européenne », comme en parle Vincent Vicard*, ce « tricotage » n’est pas rien, parce qu’il est devenu un véritable marché unique, et que le R-U en sortira.

L’IMPORTANTE VARIABLE « UNION DOUANIÈRE »

Bien que le R-U n’était pas des fondateurs du départ (du 25 mars 1957) avec les Traités de Rome instituant par exemple la Communauté économique européenne (CEE), il « tricote » son appartenance depuis 1973. Et institué grâce à l’Acte d’union signé en 1986, visant le « marché unique », l’aboutissement de l’Europe communautaire jusqu’à l’union douanière européenne est devenu une complexe réalité, solidement liée, sur les quatre fondamentaux que sont le libre accès des marchandises, des services, des personnes, des capitaux, et ce entre tous les pays membres de l’UE.

Il y aura donc eu 1973-2019 : l’Union européenne avec le R-U.

Et on sait aussi, déjà, que l’après ne ressemblera pas aux relations commerciales qu’a cette UE avec ses autres voisins immédiats.

Pourquoi?

Parce qu’est déjà connue – et il s’agit du plus gros morceau du casse-tête – la volonté affirmée par Londres de récupérer la souveraineté sur la politique commerciale, avec notamment la capacité à signer des accords commerciaux avec d’autres pays. Ceci nécessitera donc la sortie du R-U de l’union douanière qu’est le « marché unique » européen. Donc, particulièrement, le retour de sa capacité à jouer les barrières non-tarifaires aux échanges (en passant, la bête noire de l’efficacité du système commercial international depuis les récentes années…)

S’il y a un accord R-U/UE, il ne sera donc pas semblable à celui TurquieUE, ni à l’Espace économique européen (EEE) impliquant l’Islande, la Norvège et le Liechtenstein.

À l’analyse, on doit davantage attendre un accord commercial global de type classique, tel que l’AECG récemment signé entre le Canada et l’UE. (Une alternative pourrait être le modèle « à la pièce » de l’Accord Suisse-UE, mais Bruxelles a, devant Londres, déjà annoncé sa position de principe sur l’indivisibilité des quatre fondamentaux de son « marché unique » : libre accès des marchandises, des services, des personnes et des capitaux.)

Mais hors union douanière, que seront ces possibles nouvelles barrières non-tarifaires aux échanges à partir d’avril 2019 entre le R-U et les 27 de l’UE ? Voila une sous-question à la première grande question qui est très lourde de conséquences.

Au minimum, ce sera la réalité de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qui s’appliquera. Même sans un nouvel accord commercial R-U/UE, toujours membre de l’OMC, le R-U en sera. Il devra d’ailleurs, conséquemment, redéfinir ses « listes de concessions » – à moins de décider de dupliquer celle de l’UE – pour établir ses relations avec ses partenaires de l’OMC, bref le reste du monde ?

Pourquoi l’enjeu de l’impact des barrières non-tarifaires aux échanges est très important dans l’équation ? Soyons très concret : qu’arrivera-t-il pour la production des futurs avions d’Airbus qui actuellement passe, outre par les sites en Allemagne, en Espagne et en France, par le site de Filton, au R-U ?

Il faut ici comprendre qu’en situation de « marché unique » – d’union douanière – le gain passe largement par la diminution, voire la disparition, des barrières non-tarifaires aux échanges, telle que l’absence de formalités douanières, telle que l’harmonisation de normes qui éliminent donc les coûts de certification, etc. Ce qui fait que le marché unique crée « (…) près de trois fois plus de commerce entre pays membres que ne le fait un accord commercial régional classique » (selon Mayer, Vicard et Zignago; 2017).

Trois fois plus de commerce…

Ce choix de Londres de vouloir récupérer sa pleine souveraineté commerciale à travers le Brexit est donc majeur, alors qu’il n’est pas du tout obligatoire (rappelons-nous les accords TurquieUE et avec l’EEE).

Éventuellement, il coûtera des emplois à Filton.

UN COÛT SIGNIFICATIF, SURTOUT POUR LONDRES… ET L’IRLANDE

Il en coûtera… Justement, peut-on, dès à présent, évaluer l’impact économique de ce Brexit-là?

Oui.

« Dans le cas où  le Royaume-Uni et l’UE s’accorderaient sur un accord commercial classique après le Brexit, on peut estimer qu’à long terme le commerce extérieur britannique diminuera de 36% avec l’UE et augmentera de 12% avec le reste du monde, de sorte que son commerce total diminuera de 14% » (encore selon Mayer, Vicard et Zignago; 2017).

La même évaluation, cette fois selon l’impact sur le produit intérieur brut (PIB), donne -1,8% comme coût du Brexit à l’économie du R-U, voire -2,5% si une absence d’accord ne faisait appliquer que le cadre de l’OMC (mais c’est comparativement -0,3% ou -0,5% pour l’UE globalement).

On voit donc ici (entre -2,5% et -1,8% du PIB) l’incitatif important pour Londres de s’entendre avec Bruxelles pour avoir un accord commercial pour l’après Brexit rapidement. Incitatif qui est, par ailleurs, presque similaire pour le cas spécial de l’Irlande, géographiquement piégée, qui se voit prédire le même ordre de grandeur de contre-coûts dans les deux cas de figure. Alors que le poids de ce commerce R-U/UE pour l’Union, globalement, n’est évidemment pas du tout du même ordre ; et que les coûts, ici évalués en moyenne entre -0,3% ou -0,5% du PIB, voire seulement -0,2 pour les gros pays que sont la France et l’Allemagne, ne mettent pas la même pression à négocier rapidement à Paris, Berlin et Bruxelles.

Quelles seront les règles commerciales en avril 2019 entre le R-U et les 27 de l’UE? À 12 mois du Brexit, la réponse à cette question est impossible à prédire avec justesse. D’abord, il y aura le poids de l’entente de négociation de sortie. Ensuite, il faut rappeler que le Canada ou la Corée du Sud avaient mis 7 à 8 ans de négociations avant de concrétiser leur accord de commerce classique avec l’UE. C’est dire comment l’ombre du « plancher » OMC plane lourdement sur l’immédiat post-Brexit.

Finalement, sentez-vous sagement invités à retenir que 12 mois en politique, c’est une éternité !

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* Vincent Vicard est économiste au Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII), Paris (voir : L’économie mondiale 2018, un livre publié par le CEPII).

Source de l’image: www.les-crises.fr/russeurope-en-exil-le-brexit-les-medias-et-un-sondage/

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Après l’Europe, un accord avec la Chine pour le Canada ?

Alors qu’un quart des produits canadiens entraient sur le marché UE librement, c’est dorénavant presque 100% (en fait 98%) qui entreront sans frais de douane à partir d’aujourd’hui dans tous les pays de l’Union européenne. Oui, c’est en ce 21 septembre 2017 qu’entre officiellement en force et application l’accord historique de commerce CanadaEU. Mais la Chambre de commerce du Canada a déjà la tête ailleurs : elle surveille l’intensification des négociations avec la Chine.

En publiant en ce mois de septembre 2017 sa « Liste de contrôle du milieu des affaires canadien pour l’avancement des négociations commerciales avec la Chine », la CCC met en évidence le fait que le Canada s’engage dans de telles discussions commerciales, alors qu’elle plaide « en faveur d’une stratégie à plus long terme visant à atteindre des succès plus ambitieux, ainsi que d’une plus grande portée que le doublement du commerce. »

« (…) au cours des récentes années, le reste du monde s’est donné pour priorité de bâtir des liens plus forts avec la Chine, alors que le Canada a semblé être ambivalent à l’égard de sa relation, ce qui signifie que nous avons perdu notre avantage concurrentiel », analyse le document.

 

« Des problèmes importants doivent maintenant être résolus. Parmi ceux-ci, le Canada doit intensifier son partenariat économique avec la Chine, la deuxième économie mondiale, devancée uniquement par les États-Unis, et qui abrite un cinquième de la population mondiale. »

La CCC expose que des analystes ont calculé qu’un accord commercial avec la Chine pourrait améliorer le produit intérieur brut du Canada de 7,8 milliards de dollars d’ici 2030, en plus de générer 25 000 nouveaux emplois. Mais son souhait est que le Canada ne se satisfasse pas d’un simple ALE. Elle fait nombres de recommandations en ce sens.

Accord de libre-échange entre la Chine et l’Australie

Elle prend aussi bonne note de l’expérience récente de l’Australie : L’Accord de libre-échange entre la Chine et l’Australie (ChAFTA) est entré en vigueur le 20 décembre 2015. En 2015-2016, la Chine a consommé plus de 25% des exportations totales de l’Australie, faisant de la Chine le marché étranger le plus important de l’Australie pour l’agriculture, les ressources et les services. Elle affirme qu’un certain nombre de leçons peuvent être tirées par le Canada.

http://dfat.gov.au/trade/agreements/chafta/pages/australia-china-fta.aspx

L’ANNÉE 2016 A ÉTABLI UN RECORD EN MATIÈRE D’INVESTISSEMENTS CHINOIS À L’ÉCHELLE MONDIALE

Dalian Wanda a payé 3,5 milliards $US pour une participation de contrôle dans le studio d’Hollywood à l’origine de Godzilla et Monde jurassique, dans la plus grosse transaction de cinéma à ce jour pour une entreprise chinoise.

• Le géant de l’électroménager chinois, Midea, a acquis près de 95 % de l’entreprise de robotique allemande, Kuka.

• Des investisseurs chinois ont versé plus de 2 milliards $US à des équipes de football européennes depuis le début de l’année 2015.

• Le 3 février 2016, ChemChina a annoncé une offre en numéraire afin d’acquérir Syngenta pour une valeur de plus de 43 milliards $US, l’acquisition étrangère la plus importante à ce jour par une entreprise chinoise… L’acquisition de ChemChina permettra la continuité stratégique et des investissements à long terme en innovation par Syngenta, ainsi que la poursuite de son expansion et sa présence dans les marchés émergents comme la Chine. Selon les modalités de la transaction proposée, Syngenta restera Syngenta, une entreprise internationale dont le siège social est en Suisse. En plus de son portefeuille de protection des récoltes, de traitement des semences, de technologies de semences et de traits, ainsi qu’une attention particulière à l’amélioration de la productivité et de l’efficacité des ressources sur les fermes, Syngenta mettra à profit son expérience et son savoir-faire pour la promotion des normes environnementales les plus strictes et pour l’encouragement de communautés rurales prospères.

• Au début de l’année 2017, le Canada approuve l’acquisition d’une participation majoritaire d’un milliard de dollars par l’entreprise Anbang Insurance, dans celle de Retirement Concepts basée à Vancouver.

La Chambre de commerce du Canada est l’association de gens d’affaires la plus importante et influente du Canada. À ce titre, elle est le lien principal entre les entreprises et le gouvernement fédéral canadien. Forte d’un réseau de plus de 450 chambres de commerce, qui représentent 200 000 entreprises de toutes les tailles, de tous les secteurs de l’économie et de toutes les régions. Adriana Vega, directrice principale, Politiques internationale de la CCC aura la Chine en tête pour encore bien des mois.

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L’Europe sur la bonne route : 16,7% de l’énergie consommée en 2015 était renouvelable

Selon de nouvelles statistiques émanant de Bruxelles, les sources d’énergie renouvelable représentaient 16,7% de l’énergie qui fut consommée dans l’ensemble de l’Union européenne (UE) en 2015, ce qui représente presque le « double du niveau de 2004 ». Manifestement sur la bonne route, l’UE semble en bonne position d’atteindre son objectif que cette part s’élève à 20% d’ici 2020.

L’office statistique de l’union, Eurostat, précise aussi que la part des énergies renouvelables était passée de 16,1 en 2014 à 16,7% pour l’année suivante.

Retenons que pour 2004, première année pour laquelle on dispose de données, ce chiffre était de 8,5%.

Et qui est le pays vedette dans la liste ?

C’est la Suède.

Et pas avec une petite marge par rapport à la moyenne de l’union. Pour 2015, la Suède était le pays membre de l’UE qui comptait la plus grande part d’énergie provenant de sources renouvelables avec 53,9% de sa consommation totale. Preuve qu’il reste possible de largement améliorer son bilan pour toute économie développée comparable ou semblable.

Surtout lorsque l’on constate que les derniers de classe, toujours au sein de l’Union européenne, affichent un maigre 5%. Effectivement, le Luxembourg et Malte arrivent derniers, pour 2015, avec 5% de part d’énergie provenant de sources renouvelables dans leur consommation totale.

 

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Canada-Europe : où en est-on avec l’AECG ?

Par Geneviève Gagné, avocate

Cela fait bientôt deux ans que la première version du texte de l’Accord économique et commercial global (AECG) a été rendue publique. Malgré la critique médiatique et les rebondissements politiques, particulièrement en Europe, les instances impliquées dans le processus de mise en œuvre ne mettent pas en doute son aboutissement. C’est ainsi que, malgré le Brexit au Royaume-Uni et une vague de recours collectifs en Allemagne, les ministres du commerce européen viennent de donner, lors d’une rencontre à Bratislava, vendredi le 23 septembre 2016, leur appui unanime à l’adoption de l’accord. La perspective d’une entrée en vigueur provisoire au début de l’année 2017 passe ainsi au rang de forte probabilité, le droit apportant quant à lui quelques certitudes sur le processus de son adoption.

Sur le fond, la documentation relative au contenu de l’AECG est abondante et nous ne nous y attarderons donc pas. En résumé, cet accord de libre-échange avec l’Union européenne (UE) prévoit l’abolition d’environ 98% des barrières tarifaires dès son entrée en vigueur, ainsi que la diminution des barrières dites non-tarifaires (certifications, règlements techniques, etc.) L’AECG est communément appelé un accord de « nouvelle génération » parce que ses dispositions vont plus loin que les considérations purement commerciales. L’accès aux marchés publics, la mobilité internationale, la régulation de certains droits de propriété intellectuelle y sont notamment prévus.

Rappelons que les négociations de l’accord se sont terminées le 1er août 2014 et ont été annoncées officiellement le 26 septembre 2014 en même temps que la publication du premier texte officiel, qui n’a été que paraphé à ce jour. Cela signifie que le contenu préliminaire est établi, mais qu’aucune obligation juridique n’est encore créée.

L’AECG a par la suite fait l’objet d’une révision juridique qui s’est terminée le 29 février 2016 par la publication du texte final de l’accord. Il a modifié la version précédente notamment en ce qui concerne le processus d’arbitrage d’investissement, qui faisait l’objet des objections les plus massives en Europe. Un nouveau système de règlement des litiges a ainsi été instauré. Il se rapproche plus d’une cour de justice internationale que d’un tribunal d’arbitrage privé. Les décideurs y ont, entre autres, une obligation d’indépendance.

L’étape suivante est celle de la signature, qui établit de manière définitive le contenu de l’accord. Il ne s’agit pas encore d’un contrat en droit international public, mais les États sont tenus de ne pas commettre d’actes qui priveraient l’accord de son objet ou de son but. C’est à ce stade-ci que se trouve maintenant l’AECG. La ratification finalise ensuite le processus, en ce que l’accord international ainsi conclu est transposé en droit interne de chaque État signataire pour y avoir force exécutoire.

Au Canada, le déroulement du processus est bien établi et le positionnement politique en faveur de l’adoption de l’AECG a été plus ou moins constant malgré le changement de gouvernement. Vu l’importance de l’AECG, c’est le premier ministre Justin Trudeau qui en sera le signataire. Les projets de lois pour sa mise en œuvre seront ensuite préparés pour approbation par le Conseil des Ministres (Cabinet), qui ratifiera ensuite l’accord. Depuis 2008, tout traité international doit également être déposé à la Chambre des communes, qui dispose d’un délai de 21 jours pour faire des recommandations sur sa mise en œuvre. Il s’agit toutefois d’une procédure de courtoisie, sans force contraignante.

COMPLEXITÉS EUROPÉENNES

La situation est plus complexe en Europe. La détermination des signataires autorisés dépend de la question à savoir si le contenu de l’AECG relève de la compétence exclusive de l’Union européenne (accord « EU-only ») ou si certains aspects relèvent plutôt de la juridiction des États membres (« accord mixte »). Il s’agit-là d’un exercice pouvant s’avérer complexe.

En juillet 2015, la Commission européenne a d’ailleurs demandé à la Cour de justice de l’UE de trancher la question en ce qui concerne l’accord de libre-échange entre l’UE et Singapour, adoptant la position qu’il s’agit d’un accord EU-only. La décision n’a pas encore été rendue. Toutefois, bien que l’argumentaire de l’UE en ce qui concerne l’AECG soit similaire, la Commission a proposé le 5 juillet 2016 de le qualifier d’accord mixte dès le départ, ceci afin de faciliter son entrée en vigueur. Le même jour, la Commission émettait des recommandations quant à sa signature, son entrée en vigueur provisoire et sa ratification.

En pratique, c’est au Conseil de l’UE (à ne pas confondre avec le Conseil européen et le Conseil de l’Europe) de décider de ces questions sur proposition de la Commission. Dans le cas d’un accord mixte, cela signifie également que chaque État membre de l’Union devra entériner les décisions. L’approbation du Parlement européen, quant à elle, n’est techniquement requise que pour la ratification mais, afin d’augmenter la légitimité de l’AECG, elle sera également sollicitée en ce qui concerne la signature et l’entrée en vigueur provisoire.

Ainsi, si la procédure évolue de manière positive, la tendance actuelle est que le Conseil de l’UE prendra le 18 octobre prochain la décision quant à la signature et entrée en vigueur provisoire de l’AECG. Formellement, c’est lors du sommet Canada-UE à Bruxelles le 27 octobre que l’accord serait signé par l’UE et le Canada. Il entrerait par la suite provisoirement en vigueur dans le premier semestre 2017, pour la portion EU-only. Cela concerne notamment l’abolition immédiate de la presque totalité des barrières tarifaires et l’accès aux marchés public. Les sections qui ne feront vraisemblablement pas partie de l’application provisoire sont celles concernant la protection des investissements et le mécanisme de règlement des différends investisseurs-États. Le cas de figure de l’AECG n’est pas unique. Les traités de libre-échange de l’UE avec la Colombie et le Pérou sont actuellement appliqués de manière provisoire sans qu’ils ne soient encore ratifiés par les États membres, ce processus pouvant durer entre 2 et 4 ans.

D’ici-là bien sûr, il s’agira d’observer si les inévitables rebondissements dans la conclusion d’un traité international significatif auront une influence quelconque sur le processus.

L’ENJEU BREXIT, MAIS AUSSI ALLEMAND…

Déjà, le 23 juin dernier se tenait entre autres le vote sur le Brexit, à l’issue duquel la population britannique a voté avec une faible majorité pour le retrait du pays de l’UE. Or, entre 40% et 50% des échanges commerciaux québécois sont avec le Royaume-Uni, qui représente environ 20% de l’impact économique européen et 60 millions de consommateurs sur un bassin total de 500. Il s’agit de considérations dont le Canada a tenu compte lors de la négociation de l’AECG et une renégociation de l’accord pourrait être demandée advenant la sortie des britanniques de l’UE. Toutefois, le discours politique majoritaire de chaque côté de l’Atlantique fait état d’une réticence à réouvrir les négociations, étant donné le risque élevé de voir tomber l’accord en entier. Aussi, si en 2018 le Royaume-Uni sortait bel et bien de l’UE, un nouvel accord avec le pays serait vraisemblablement négocié par le Canada, éventuellement sur la base de l’AECG.

Il y a également cette vague de recours collectifs en Allemagne, demandant à ce que soit empêchée l’entrée en vigueur provisoire de l’AECG. Au nombre de cinq, le plus important regroupe 125 047 procurations. Essentiellement, on y invoque des violations de la constitution allemande advenant l’entrée en vigueur provisoire et une implication déficiente du parlement allemand, ainsi que des droits exagérés aux investisseurs étrangers et aux comités qui seront créés sous l’égide de l’AECG. Ces questions devront être examinées par la cour constitutionnelle allemande, le nombre de plaignants n’ayant toutefois aucune influence sur l’issue de la décision.

Aussi, qu’arriverait-t-il si l’AECG entrait en vigueur de manière provisoire, mais qu’un État membre faisait défaut de le ratifier par la suite? Dans les faits, cela n’aurait aucun impact sur les dispositions EU-only (droits de douane, certifications, etc.) qui continueraient de s’appliquer, seules celles de compétence nationale (environ 5%-10% de l’accord), ne trouveraient pas application. Une fois l’entrée en vigueur provisoire décidée, seule une déclaration par l’UE ou le Canada à l’effet qu’ils ne désirent plus faire partie de l’AECG pourrait l’annuler.

Toutefois, même si l’adoption de l’AECG demeure encore soumise à une certaine imprévisibilité due aux aléas politiques, les récents développements en Europe indiquent que l’entrée en vigueur de l’AECG est désormais plus prévisible que spéculative.

Le processus de mise en œuvre et d’application s’inscrit également dans un cadre connu. Au Canada, la venue de l’AECG se fait de manière relativement sereine. En termes de consommateurs et de pouvoir d’achat, l’UE représente également pour le Canada un marché plus important que l’inverse. Toutefois, pour l’UE, l’AECG constitue un enjeu au niveau du maintien de sa crédibilité en tant qu’interlocuteur économique, ainsi que dans le cadre de sa stratégie de développement commercial. En somme, ce qui semble se dégager dans ce contexte, c’est que dans l’ensemble il y a encore plus à y gagner qu’à y perdre!

www.jolicoeurlacasse.com

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Accord Canada-Europe : les experts ciblent le 27 octobre pour sa signature

« Si la procédure évolue de manière positive, la tendance actuelle est que le Conseil de l’UE prendra le 18 octobre prochain la décision quant à la signature et entrée en vigueur provisoire de l’AECG. Formellement, c’est lors du sommet Canada-UE à Bruxelles le 27 octobre que l’accord serait signé par l’UE et le Canada », analyse l’avocate experte québécoise Geneviève Gagné, dans la dernière chronique juridique de Commerce Monde.

Et vu l’importance de l’AECG « c’est le premier ministre Justin Trudeau qui en sera le signataire », affirme-t-elle aussi.

L’important accord entrerait par la suite provisoirement en vigueur dans le premier semestre 2017, pour la portion EU-only, avec notamment l’abolition immédiate de la presque totalité des barrières tarifaires et l’accès aux marchés public.

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Geneviève Gagné
est avocate chez JoliCoeur-Lacasse,
à Québec.

L’ENJEU ALLEMAND

Au-delà du Brexit au Royaume-Uni, c’est davantage une vague de recours collectifs en Allemagne demandant à ce que soit empêchée l’entrée en vigueur provisoire de l’AECG qui occupent les experts. Au nombre de cinq, le plus important des recours regroupe plus de 125 000 procurations.

On invoque des violations de la constitution allemande advenant l’entrée en vigueur provisoire et une implication déficiente du parlement allemand, ainsi que des droits exagérés aux investisseurs étrangers et aux comités qui seront créés sous l’égide de l’AECG.

« Ces questions devront être examinées par la cour constitutionnelle allemande (…) le nombre de plaignants n’ayant toutefois aucune influence sur l’issue de la décision. Si l’AECG entrait en vigueur de manière provisoire, mais qu’un État membre faisait défaut de le ratifier par la suite, dans les faits, cela n’aurait aucun impact sur les dispositions EU-only qui continueraient de s’appliquer, seules celles de compétence nationale (environ 5%-10% de l’accord) ne trouveraient pas application. Une fois l’entrée en vigueur provisoire décidée, seule une déclaration par l’UE ou le Canada à l’effet qu’ils ne désirent plus faire partie de l’AECG pourrait l’annuler », explique encore Geneviève Gagné.

Conclusion en cette fin de septembre 2016 : Même si l’adoption de l’AECG « demeure encore soumise à une certaine imprévisibilité due aux aléas politiques », les récents développements en Europe indiquent que l’entrée en vigueur de l’AECG « est désormais plus prévisible que spéculative ».

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